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CAÏN. Mais il n’est pas comme les anges que nous avons vus.

ADAH. Y en a-t-il donc d’autres ? Mais il est le bienvenu comme eux ; ils ont daigné être nos hôtes. Y consent-il ?

CAÏN. Le veux-tu ?

LUCIFER. Je te demande d’être le mien.

CAÏN. Il faut que j’aille avec lui.

ADAH. Et tu nous quittes ?

CAÏN. Oui.

ADAH. Moi aussi ?

CAÏN. Chère Adah !

ADAH. Laisse-moi t’accompagner.

LUCIFER. Non ; cela ne se peut.

ADAH. Qui es-tu, toi, qui t’interposes entre le cœur et le cœur ?

CAÏN. C’est un Dieu.

ADAH. Comment le sais-tu ?

CAÏN. Il parle comme un Dieu.

ADAH. Ainsi faisait le serpent, et il mentait.

LUCIFER. Tu te trompes, Adah ! — L’arbre n’était-il pas celui de la science ?

ADAH. Oui, — à notre éternelle douleur.

LUCIFER. Cependant cette douleur est une science ; il n’a donc pas menti : s’il vous a perdus, c’est avec la vérité ; et la vérité dans son essence ne peut être que bonne.

ADAH. Mais tout ce que nous en connaissons a amené malheur sur malheur : notre expulsion du lieu de notre naissance, et la crainte, et le travail, et les sueurs, et la fatigue ; le remords de ce qui fut, — et l’espérance de ce qui n’arrive pas. Caïn ! ne va pas avec cet esprit, supporte ce que nous avons supporté, et aime-moi. — Je t’aime.

LUCIFER. Plus que ta mère et ton père ?

ADAH. Oui. Est-ce là aussi un péché ?

LUCIFER. Non, pas encore. Mais un jour c’en sera un pour vos enfants.

ADAH. Quoi ! ma fille ne pourra-t-elle aimer son frère Énoch ?

LUCIFER. Non comme tu aimes Caïn.