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ADAM. Caïn, mon fils, mon premier né, pourquoi demeures-tu muet ?

CAÏN. Pourquoi parlerais-je ?

ADAM. Pour prier6.

CAÏN. N’avez-vous pas prié ?

ADAM. Oui, et avec ferveur.

CAÏN. Et d’une voix haute. Je vous ai entendu.

ADAM. Et Dieu aussi, je l’espère.

ABEL. Ainsi soit-il.

ADAM. Mais toi, mon premier né, tu continues à garder le silence.

CAÏN. Il vaut mieux que je me taise.

ADAM. Pourquoi ?

CAÏN. Je n’ai rien à demander.

ADAM. Et rien dont tu doives rendre grâce ?

CAÏN. Non.

ADAM. Ne vis-tu pas ?

CAÏN. Ne dois-je pas mourir ?

ÈVE. Hélas ! voilà déjà le fruit de l’arbre défendu, qui commence à tomber.

ADAM. Et il nous faut le ramasser. O Dieu ! pourquoi as-tu planté l’arbre de la science ?

CAÏN. Et pourquoi n’avez-vous pas cueilli le fruit de l’arbre de vie ? Vous auriez pu alors le braver.

ADAM. O mon fils, ne le blasphème pas : ce sont là des paroles du serpent.

CAÏN. Pourquoi pas ? Le serpent a dit vrai : c’était l’arbre de la science, c’était l’arbre de vie : la science est bonne, et la vie est bonne ; en quoi l’une et l’autre seraient-elles un mal ?

ÈVE. Mon enfant ! tu parles comme je parlais dans le péché, avant ta naissance. Que je ne voie pas mon malheur se renouveler dans le tien ! Je me suis repentie : que je ne voie pas, hors du Paradis, mon fils tomber dans les pièges qui, jusque dans le Paradis, ont perdu ses parents ! Contente-toi de ce qui est. Si nous l’avions fait, tu serais content aujourd’hui. — O mon fils !