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HEURES DE PARESSE.

quittons pour ne plus nous revoir, où celle qui me fut si chère s’arrache a moi, et part pour de lointains rivages !

N’importe ! nous avons passé quelques moments heureux, et il y aura de la joie mêlée à nos larmes quand notre pensée se reportera vers ces tours antiques qui abritèrent notre enfance.

Montés sur leur gothique sommet, nous contemplions le lac, le parc, la vallée ; et maintenant encore, à travers le voile de nos pleurs, nos regards leur adressent un dernier adieu,

À ces campagnes que nous avons tant de fois parcourues, théâtre de nos jeux enfantins ; à ces ombrages où, fatigués de nos excursions, nous nous reposions, ta tête appuyée sur mon sein ;

Pendant que moi je te contemplais d’un œil d’admiration, et j’oubliais d’écarter de ton beau visage l’insecte ailé à qui j’enviais le baiser qu’il posait sur tes yeux endormis.

Vois la petite nacelle peinte dans laquelle, la rame en main, je te promenais sur le lac ; vois aussi l’ormeau qui balance sur le parc son vaste ombrage, et que j’escaladais à ta voix.

Ces temps sont passés. — Plus de joie : tu me quittes, tu quittes cette vallée heureuse ! Ces beaux lieux, je vais désormais être seul à les parcourir. Sans toi, quel charme auront-ils pour moi ?

Ah ! nul, sans l’avoir éprouvé, ne pourra concevoir tout ce qu’il y a d’amertume dans un dernier embrassement, alors que, séparé de tout ce qu’on aimait, on dit au bonheur un long adieu.

Oh ! c’est là le plus douloureux des maux ; c’est là ce qui maintenant humecte nos joues de larmes brûlantes ; c’est le terme final de l’amour, c’est le dernier, le plus tendre adieu.




À M. S. G.

Chaque fois que je vois tes lèvres charmantes, je suis tenté d’y déposer un baiser de flamme ; mais ce bonheur céleste, je me l’interdis : ce serait une félicité coupable.