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à la comtesse, après leur dernier entretien. Ce monarque fut assez satisfait de sa maîtresse, et il ne jugea plus cette conquête aussi difficile qu’il avoit cru au commencement ; au moins il ne la jugea pas impossible. La comtesse lui parut assez traitable, et il ne remarqua pas en elle cette même sévérité qui lui avoit fait tant de peur. Cependant cet amant se flattoit, et l’heure d’aimer de la comtesse n’étoit pas encore venue. Mais aussi cette vertueuse dame, qui n’y entendoit point de finesse, s’étoit plus avancée qu’elle ne croyoit, ce qui fut la cause de l’erreur du Roi. Ils reconnurent bientôt l’un et l’autre qu’ils s’étoient trompés, lui de croire qu’on le regardoit favorablement ; elle, de s’imaginer qu’elle avoit soutenu jusques au bout sa première sévérité. Ce prince impatient, et par l’excès de son amour et par la facilité qu’il avoit trouvée dans toutes ses autres maîtresses, et parce qu’un roi se lasse bientôt d’attendre, chercha une nouvelle occasion de voir la comtesse, et de pousser plus loin les affaires.

Comme les principaux de la Cour avoient un appartement dans le grand et magnifique palais de Fontainebleau, le comte de L… et la comtesse sa femme y avoient aussi le leur. Cela fournissoit au Roi la commodité de la voir, et fit naître l’occasion qu’il attendoit avec tant d’impatience. Un jour que ce prince vit la porte de l’appartement de la comtesse entr’ouverte, il eut la curiosité d’y regarder, et, ne voyant personne, il entra comme à la dérobée. Il ne se fut pas plus tôt approché d’un lit de repos qu’il y avoit dans cette chambre, qu’il vit la comtesse