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Après cela, il raconta au Roi tout ce qui s’étoit passé, et insista surtout sur la réponse malicieuse de cette cruelle : — « Mais, Sire, ajouta-t-il, ne vous alarmez pas ; j’en ai bien vu bien d’autres, qui faisoient les fières comme la comtesse, et qui se sont mises à la raison. — Mais que puis-je attendre d’une femme, lui répliqua le Roi, qui n’aime que son mari, et qui m’oppose ce mari fâcheux quand on l’entretient de mon amour ? N’est-ce pas m’ôter absolument l’espérance ; ou, pour mieux dire, n’est-ce pas se moquer de moi, que de me faire dire qu’il faut qu’elle en parle plutôt au comte son époux ? — Je vous avoue, répondit le duc, que sa réponse est tout-à-fait cavalière ; mais, Sire, puisqu’elle a besoin du secours de son mari pour se défendre de vos poursuites, c’est une marque qu’elle ne se croit pas assez forte pour y résister. Mais ne craignez pas qu’elle lui fasse une telle confidence, dont peut-être elle seroit la première à se repentir. En un mot, je crois que c’est un rempart qu’elle veut opposer à votre amour, et dont elle veut appuyer cette foiblesse assez naturelle à celles de son sexe.

Le Roi voyoit bien que le duc vouloit adoucir autant qu’il pouvoit ce qu’il y avoit de rude dans cette entreprise ; et comme ce Monarque s’est toujours fait un point d’honneur de réussir dans tout ce qu’il entreprend, quelques difficultés qu’il y puisse rencontrer, celles qui se présentoient dans son dessein amoureux ne firent que l’enflammer davantage par la résistance. Il s’en expliqua ouvertement à son confident ; il lui dit que tous les rebuts, qu’il prévoyoit bien qu’il