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places de tant de grands guerriers qui avoient perdu la vie à la bataille de Senef[1], qui est un village situé dans le Brabant.

Le prince de Vaudemont[2], qui avoit reçu quelque légère blessure, s’étoit retiré dans le bois de Bufferay, quand la comtesse de Souche[3], qui l’aimoit plus que sa vie, alla le trouver et lui pansa toutes ses plaies avec des onguents qu’elle avoit faits exprès pour lui. Jamais femme n’a tant aimé que celle-là, ce qui nous fait rejeter la méchante opinion des hommes, qui disent généralement que le sexe féminin est incapable d’un fort attachement. Mais revenons à notre passionnée amante. Elle n’eut pas plus tôt appris le malheur du prince, son cher amant, qu’elle tomba dans une foiblesse qui lui dura plus de trois heures, avec des soupirs languissants, qui marquoient le triste état de son âme affligée. Après le retour de cette pâmoison, elle embrassa tendrement l’objet de son amour, le serrant avec ardeur entre ses bras, et lui dit en tournant ses yeux vers le ciel : — « Ah ! mon cher, je ne suis revenue en ce monde que pour vous aimer plus que jamais. J’ai cru que la mort vous avoit

  1. Le 11 août 1674, le prince d’Orange fut défait, avec trois armées, à la bataille de Senef, par le prince de Condé. Notons toujours la même confusion dans les dates.
  2. Voy. la table. — Charles-Henri de Lorraine, prince de Vaudemont, fils du duc Charles IV et de Mme de Cantecroix, sa femme de campagne, comme on l’appeloit, servoit contre nous. — C’est donc encore un nom mis au hasard.
  3. Personnage imaginaire.