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ces vers, où elle reprochoit au Roi son changement. Les voici qui suivent :

Quand vous commenciez à m’aimer,
Vous ne pouviez pas me quitter,
Sans vous faire une peine extrême.
Le souvenir en fait ma gêne
Et le sujet de mon tourment.
Pourquoi m’aimer si tendrement ?
Vous savez très-bien comme on aime ;
Mais, hélas ! êtes-vous le même ?

Madame de Montespan ayant fini sa poésie, fut se promener au Cours-la-Reine, où elle rencontra le Roi dans son carrosse, qui passa à côté d’elle fort froidement et qui se contenta de lui faire une grande révérence. Notre belle étoit dans ce moment au désespoir de voir l’indifférence de son amant. Après avoir fait tout son possible, pour allumer un feu qui vouloit absolument mourir, cette dame croyoit, après la mort de mademoiselle de Fontanges que Sa Majesté reviendroit à elle ; mais hélas ! que les femmes qui sont galantes se trompent fortement dans ces sortes d’espérances ! Quand une fois l’amour a été au comble de son bonheur, cette passion diminue de moment en moment, et ne se fait plus connoître. Il ne reste plus que la rage et le chagrin à ces belles courtisanes de n’être plus aimées, et de dire souvent à leurs amants qui rient d’elles : Vous m’aimiez autrefois et vous ne m’aimez plus. Ces tristes idées me désolent le cœur. Ah ! qu’il est bien plus généreux, selon mon sentiment, de conserver toujours sa liberté, quand on le peut, que de la mettre dans un péril si dangereux ! Les hommes