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une houlette. Et comme il est naturel à un cœur généreux d’aimer ceux qui nous aiment, le Roi l’aima dès ce premier moment, et lui dit un jour en riant : « Venez, ma belle aux yeux doux, qui ne pouvez aimer qu’un prince. »

Ce n’est pas que sa personne lui plût ; mais par reconnoissance, Sa Majesté dit au comte de Guiche qu’il la vouloit marier à un marquis qu’il lui nomma et qui étoit des amis du comte ; ce qui lui fit répartir au Roi que son ami aimoit les belles. — « Eh bien ! dit le Roi, je sais bien qu’elle n’est pas une incomparable beauté ; mais je lui ferai assez de bien pour la faire chérir. »

Quelque temps après, le Roi fut chez Madame qui étoit un peu indisposée, et s’arrêta dans l’antichambre avec La Valière à laquelle il parla longtemps. Ce prince demeura si charmé de son esprit et de ses manières engageantes que sa reconnoissance devint amour. Mais comme ce prince cherchoit l’occasion de lui dire tout ce qu’il sentoit pour elle, parce qu’il en étoit pressé et qu’il y avoit déjà du temps qu’il languissoit secrètement, il la trouva. Il lui auroit été bien facile s’il eût considéré qu’il étoit Roi ; mais la qualité d’amant lui paroissoit trop charmante pour n’en pas suivre les lois. Ce fut à Versailles, dans le parc, que le Roi se plaignit tendrement que depuis plus de trois mois sa santé n’étoit pas bonne. Mlle de La Valière[1], en parut affligée, et en marqua du chagrin, ce qui toucha le Roi sensiblement, et lui fit dire : — « Hélas ma

  1. A partir d’ici, le texte abrége le récit du t. II et en diffère sur des points peu importants, par exemple le billet de la p. 250.