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les manières les plus tendres du monde. Notre jeune Monarque pleura et cria, se jeta aux pieds du cardinal et l’appela son papa ; mais hélas ! il étoit destiné que les deux amants se sépareroient. Cette amante affligée étant pressée de partir, et montant en carrosse, dit fort spirituellement à son amant, qu’elle voyoit dans une douleur accablante : « Vous pleurez, et vous êtes Roi ! pourtant je suis malheureuse et je pars dès ce moment ! »

Le Roi pensa mourir de chagrin de la cruelle séparation de sa chère mignonne ; mais comme ce Prince étoit encore jeune, il se consola plus facilement, et son cœur ne demeura pas longtemps dans la tranquillité. Nous le verrons par la suite.

Quand Philippe IV, roi d’Espagne, fut mort[1], notre inconsolable Monarque forma le dessein d’aller aux Pays-Bas, pour mettre la Reine son épouse en possession des États qui lui appartenoient ; Sa Majesté y entra avec toute la magnificence qui pouvoit charmer les sens[2]. Elle étoit précédée de deux compagnies de mousquetaires richement vêtus, et leurs chapeaux garnis de plumes blanches, comme le reste des gardes du corps. Notre illustre Prince étoit vêtu d’un habit en broderie d’or mêlé de perles, avec un superbe bouquet de plumes incarnates et blanches, attaché d’un cœur de diamants. Le Roi étoit monté sur un cheval dont la marche

  1. Le 15 septembre 1665.
  2. Voyez sur cette campagne, Mlle de Montpensier, Mémoires, collection Michaud et Poujoulat, pp. 398-402, et Mémoires de Louis XIV, édition Dreyss, t. II.