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qui es tout ruiné et rendu incapable de satisfaire une jeune coquette comme est la du Tron ?

Le Maure. — Madame, je ne saurois qu’y faire ; mais le Roi est de fort belle humeur.

Mme de Maintenon. — C’est ce qui me chagrine. — Maure, va dire à Sa Majesté que je viens de recevoir une lettre de l’armée du maréchal de Boufflers[1] qui se trouve fort embarrassé dans Namur à repousser les ennemis.

Le Maure. — Madame, je n’ose.

  1. Voici ce que dit, à ce sujet, la Gazette de France… — « De Dinant, le 5 septembre 1695 : Le 30 du passé (août), à 11 heures du matin, les ennemis donnèrent un assaut général avec 15,000 hommes à la partie de la ville (de Namur) que les assiégés (commandés par Boufflers) occupoient au poste de la Cassote et au fort Guillaume.

    « Le 1er de ce mois, les alliés donnèrent un autre assaut général avec 20,000 hommes…; les brèches étoient si grandes qu’il pouvoit y monter un bataillon de front… Le carnage fut si grand qu’il n’y en a point eu de pareil en Europe depuis plus d’un siècle, puisque les ennemis eurent, dans cet assaut, 9,000 hommes tués ou blessés et les nôtres 3,000. Mais comme la garnison se trouva réduite à 5,000 hommes, dont il ne restoit que 2,300 en état de combattre, et que tous les ouvrages étoient presque entièrement renversés, on jugea à propos de capituler. Les articles furent arrêtés le 2 avec l’Electeur de Bavière. Ils contiennent en substance que la place seroit rendue le 5, en cas qu’elle ne fût pas secourue auparavant, et que la garnison sortiroit par la brèche, pour être conduite à Givet sous Charlemont, avec six pièces de canon, deux mortiers, armes et bagages, enseignes déployées, tambour battant, et toutes les autres conditions les plus honorables. La garnison est sortie aujourd’hui, mais le maréchal de Boufflers a été arrêté par ordre du prince d’Orange, au préjudice de la capitulation. Les ennemis ont demeuré soixante-sept jours devant la place, et on n’a jamais vu une plus courageuse défense. »

    « Du camp de Cambron le 10 septembre. » — Le maréchal de Boufflers fut transféré le 8 à Maëstricht ; la ville lui fut donnée pour prison.

    — « De Versailles, le 9 septembre : Le Roi, pour tesmoigner de la satisfaction qu’il eut de ses services dans la vigoureuse défense de Namur, l’honora du titre de duc. »

    — Ce triste événement est resté complètement et sans doute volontairement ignoré de l’abbé de La Brizardière dans son « Histoire de Louis le Grand depuis le commencement de son règne jusques en 1710 » ; il n’en dit mot.