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ce que je n’ai pas de peine à croire, parce qu’ayant éprouvé, comme elle a fait, l’inconstance des choses du monde, elle voit bien qu’il n’y a qu’en Dieu seul qu’on doive mettre son espérance.

Sa retraite satisfit également le grand Alcandre et madame de Montespan : celle-ci, parce qu’elle appréhendoit toujours qu’elle ne rentrât dans les bonnes grâces du grand Alcandre, dont elle avoit possédé les plus tendres affections ; celui-là, parce que sa présence lui reprochoit toujours son inconstance. Cependant le temps des couches de cette dame approchant, le grand Alcandre se retira à Paris, où il n’alloit que rarement, espérant qu’elle y pourroit accoucher plus secrètement que s’il demeuroit à Saint-Germain, où il avoit coutume de demeurer.

Le terme venu, une femme de chambre de madame de Montespan, en qui le grand Alcandre et elle se confioient particulièrement, monta en carrosse et fut dans la rue Saint-Antoine, chez le nommé Clément, fameux accoucheur de femmes, à qui elle demanda s’il vouloit venir avec elle pour en accoucher une qui étoit en travail. Elle lui dit en même temps que, s’il vouloit venir, il falloit qu’on lui bandât les yeux, parce qu’on ne désiroit cas qu’il sût où il alloit. Clément, à qui de pareilles choses arrivoient souvent, voyant que celle qui le venoit quérir avoit l’air honnête, et que cette aventure ne lui présageoit rien que de bon, dit à cette femme qu’il étoit prêt de faire tout ce qu’elle voudroit ; et, s’étant laissé bander les yeux, il monta en carrosse avec elle, d’où étant descendu après avoir fait plusieurs