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Sujet de flamme et maîtresse nouvelle.
    Mais le petit ambitieux
Voulut porter trop haut son vol audacieux ;
  Voyant souvent l’Aiglonne incomparable,
  Il la trouvoit infiniment aimable ;
    Enfin il l’aima tout de bon,
    Et, sans consulter la raison,
   Le drôle se mit dans la tête
    De lui faire agréer ses feux
    Et d’entreprendre sa conquête.
Voyez comme l’amour nous fait fermer les yeux,
Et voyez cependant combien il fut heureux !
    D’une si charmante manière
    Et d’un air si respectueux
    Il sut faire offre de ses vœux,
    Que notre aiglonne noble et fière,
    Pour lui mettant bas la fierté,
Ne se ressouvient pas de l’inégalité.
  Ouï, d’autant plus qu’il lui paroissoit brave,
Vigoureux, plein d’amour, galant au dernier point,
    La belle ne dédaigna point
L’impérieux effort de cet indigne esclave ;
Bien plus, elle approuva son désir indiscret,
    Lui sut bon gré de sa tendresse,
    Rendit caresse pour caresse,
    Et même n’en fit point secret.
Encor pour un de nous la faute étoit passable :
Notre plumage vert la rendoit excusable,
    Et d’ailleurs notre qualité
    Rendoit le parti plus sortable ;
    Mais pour un si petit oiseau,
C’est un aveuglement qui n’est pas pardonnable !
Il est vrai que c’étoit un aimable Moineau,
Quoiqu’à ce qu’on m’a dit, il n’étoit pas fort beau ;