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madame d’Olonne, les hommes prétendent que nous les aimions sans qu’ils nous l’aient demandé, car j’ai ouï dire autrefois que c’étoit eux qui faisoient les avances. Je sçavois bien qu’ils traitoient dans ces derniers temps la galanterie d’une étrange manière, mais je ne sçavois pas qu’ils l’eussent réduite au point de vouloir que les femmes les priassent. »

« Quoi ! repondit Sillery, Marsillac n’a pas dit qu’il vous aimoit ? — Non, Monsieur, lui dit-elle ; c’est vous qui me l’avez appris. Ce n’est pas que les soins qu’il m’a rendus ne m’aient fait soupçonner qu’il y avoit quelque dessein ; mais jusqu’à ce que l’on ait parlé nous n’entendons point le reste. — Ah ! Madame, repliqua Sillery, vous n’avez pas tant de tort que je pensois. La jeunesse de Marsillac le rend timide : c’est ce qui l’a fait faillir ; mais cette jeunesse aussi fait bien excuser des choses avec les femmes. On n’a guère de tort à l’âge qu’il a, et pour les gens de vingt ans il y a bien du retour à la miséricorde. — J’en demeure d’acord, reprit madame d’Olonne ; la honte d’un jeune homme donne de la pitié et jamais de la colère ; mais je veux aussi qu’il ait du respect. — Appelez-vous, Madame, respect, lui dit Sillery, de n’oser dire que l’on aime ? C’est sottise toute pure, je dis à l’égard d’une femme qui ne voudroit pas aimer ; car, en ce cas-là, on ne perdroit pas son temps et l’on sauroit bientôt à quoi s’en tenir. Mais ce respect que vous demandez, Madame, ne vous est bon qu’avec ceux pour qui vous n’avez nulle inclination, car, si celui que vous voudriez aimer en avoit un peu trop, vous seriez bien embarrassée. » Comme il achevoit de