Page:Bussy Rabutin - Histoire amoureuse des Gaules, t. 1, éd. Boiteau, 1856.djvu/38

Cette page n’a pas encore été corrigée

mais la légèreté qu’elle témoignoit en toute chose lui faisoit appréhender de s’embarquer avec elle. Enfin, s’étant trouvé un jour tête-à-tête : « Si je ne voulois, lui dit-il, Madame, que vous faire savoir que je vous aime, je n’aurois que faire de vous parler, mes soins et mes regards vous ont assez dit ce que je sens pour vous ; mais, comme il faut, Madame, que vous répondiez un jour à ma passion, il est nécessaire que je la découvre, et que je vous assure en même temps que, soit que vous m’aimiez ou que vous ne m’aimiez pas, je suis résolu de vous aimer toute ma vie. »

Beuvron ayant cessé de parler : « Je vous avoue, Monsieur, lui répondit madame d’Olonne, que ce n’est pas d’aujourd’hui que je reconnois que vous m’aimez, et, quoique vous ne m’en ayez pas parlé, je n’ai pas laissé de vous tenir compte de tout ce que vous avez fait pour moi dès le premier moment que vous m’avez vue ; et cela me doit servir d’excuse quand je vous avouerai que je vous aime. Ne m’en estimez donc pas moins, puisqu’il y a assez long-temps que je vous entends soupirer ; et quand même on pourroit trouver quelque chose à redire à mon peu de résistance, ce seroit une marque de la force de votre mérite plutôt que de ma facilité. » Après cet aveu, l’on peut bien juger que la dame ne fut pas long-temps sans donner au cavalier les dernières faveurs. Cela dura

    « C’est l’ouvrage de madame de Maintenon, qui s’est souvenue fort agréablement de l’ancienne amitié de M. de Beuvron et de madame d’Arpajon pour elle, du temps de madame Scarron. » Ce dire est confirmé par madame de Caylus (p. 4 de l’édit. de 1808), qui cite le marquis de Beuvron comme l’un des garants de la constante chasteté de sa tante.