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l’abbé Le Camus[1] et Manchiny, celui-ci neveu du cardinal, et l’autre un des aumôniers du roi, et y ayant passé trois ou quatre jours, sinon dans une grande dévotion, au moins dans des plaisirs fort innocens, le comte de Guiche et Manicamp, qui s’ennuyoient à Paris, l’allèrent trouver. Sitôt que

    chassa de la cour et de sa présence ; et, après avoir châtié celui-là, il pardonna à tous les autres, qui en furent quittes pour de sévères réprimandes que le roi leur fit. »

  1. Saint-Simon (t. 6, p. 121) lui a consacré trois pages que nous voudrions lui emprunter. Il ne faut pas le confondre avec Pierre Camus de Pont-Carré, que madame de Sévigné comptoit au nombre de ses bons amis. Il étoit frère du premier président de la cour des Aides et du lieutenant civil du Châtelet, et tous les trois descendoient d’une famille marchande (V. La Bruyère, t. 2, p. 201), dont ils firent tout simplement passer l’enseigne (Au Pélican) dans leurs armes.

    L’abbé Le Camus fut d’abord très léger. Il s’en repentit, vécut dans la pratique des devoirs les plus difficiles, et imagina de ne vivre que de légumes. Innocent XI le prit pour cela en amitié et lui envoya le chapeau proprio motu, sans sollicitation aucune, sans avis, sans enquête. Le Camus étoit évêque de Grenoble, sur le passage de la barrette. Contre l’usage, il la prit sans l’aller recevoir à Versailles : aussi fut-il disgracié à la cour (1689).

    « Pendant que le cardinal Le Camus n’étoit qu’aumônier du roi, il n’étoit pas si grave qu’il l’a été depuis, et se mettoit sur le pied de faire rire S. M. quand il en trouvoit l’occasion. » (Senecé, édit. elzev., t. 1, p. 317.)

    « Etant simple abbé, il argumenta un jour à la Sorbonne avec beaucoup de chaleur contre cette définition de l’Église : Congregatio fidelium sub uno capite ; car, disoit-il, à chaque vacance du Saint-Siége, il n’y auroit plus d’Église.

    « Le cardinal Le Camus et le dernier archevêque de Vienne, du nom de Villars, dînant un jour ensemble dans un lieu du diocèse de Grenoble où ils s’étoient rencontrés, l’archevêque dit au cardinal : Eh ! Monseigneur, mangerez-vous toujours de ces méchantes racines ? Et le cardinal répondit : Monsieur, vous les trouveriez bonnes si elles vous avoient aidé à devenir cardinal. » (Amelot de la Houssaye, t. 2, p. 30.)

    Madame de Sévigné disoit de lui : « C’est l’homme du