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« Cependant, Monsieur, j’attends avec une extrême résignation à ses volontés la grâce de ma liberté, et j’ai d’ailleurs un si grand déplaisir d’avoir offensé les personnes qui ne m’en avoient jamais donné de sujet, que, si ma prison ne leur paroissoit pas une assez rude pénitence, je serai toujours prêt à faire tout ce qu’elles souhaiteront de moi pour leur entière satisfaction, leur étant infiniment obligé quand elles me pardonneront, et ne leur sçachant pas mauvais gré quand elles ne le feront pas.

« Je sçais bien qu’il y a dans mon procédé plus d’imprudence que de malice ; mais l’innocence de mes intentions ne console pas les gens que j’assassine, puis qu’ils sont aussi bien assassinés que si j’en avois eu le dessein.

« Ce que l’on peut dire en deux mots de tout ceci, c’est que le public en me condamnant doit me plaindre, mais que les offensés peuvent me haïr avec raison.

« Voilà, Monsieur, ce que j’ai cru vous devoir apprendre de mes affaires, pour vous montrer par le libre aveu que je fais de ma faute, et le grand repentir que j’en ai, combien je suis éloigné d’en commettre jamais de pareilles, ni de fâcher qui que ce soit mal à propos.

« Mais vous allez encore mieux voir, par le raisonnement que je vais faire, combien je suis persuadé qu’il ne faut jamais rien écrire contre personne : car, si l’on n’écrit que pour soi, c’est comme si l’on le pensoit, et ceci est bien le plus sûr ; si c’est pour le montrer à quelqu’un, il est infaillible qu’on le scaura tôt ou tard ; si la chose est mal écrite, elle fera de la honte ; s’il y a de