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crut que, si madame de Châtillon y demeuroit, il auroit des rivaux sur les bras qui lui pourroient être préférés : de sorte qu’il persuada au cardinal de l’éloigner, disant qu’elle auroit à Paris tous les jours mille intrigues contre les intérêts de la cour qu’elle ne pourroit pas avoir ailleurs ; et cela obligea le cardinal à l’envoyer à Marlou. L’abbé Foucquet l’y alloit voir le plus souvent qu’il pouvoit ; mais il y avoit encore dans son

    l’attaque point. Quelques petites touches suffisent pour ce que ce volume réclame. D’abord, Louis XIV, c’est le type du roi. Voyez-le à son baptême ; il a cinq ans tout au plus (Montglat, p. 136) :

    « On le mena, au sortir de la chapelle, dans la chambre du roi, qui lui demanda comme il avoit nom. Il répondit : « Louis XIV. » Sur quoi le roi répliqua : « Pas encore ! pas encore ! »

    En amour, il a commencé par n’être qu’un homme. Plus tard, ç’a été le roi et le roi absolu. D’abord, il a soupiré ; comme un autre, il a été galant, tendre, passionné, mélancolique ; il a rimé pour les belles, ou il s’est fait faire des chansons en leur honneur. Certainement il a aimé mademoiselle Mancini et La Vallière. C’est Joseph de Maistre qui a dit (Lettres, t. 1, p. 73, 2e édition) : « La maîtresse d’un roi marié est une coquine comme celle d’un laquais. » Peut-être a-t-il raison en bonne morale ; mais, ô rigoriste ! mademoiselle de La Vallière ne sera jamais une coquine.

    On auroit quelque peine à dresser complète la liste de toutes les personnes que Louis XIV a recherchées.

    « Le roi étoit galant, mais souvent débauché ; tout lui étoit bon, pourvu que ce fussent des femmes. » (Madame, 24 décembre 1716.)

    Aussi plusieurs de celles qu’il a favorisées sont-elles restées inconnues. Il y avoit dans le nombre des filles de jardinier : n’a-t-on pas voulu y joindre une négresse ? Mais, sans interroger bien rigoureusement le secret des Mémoires, on citera madame de Beauvais, la comtesse de Soissons, la connétable Colonna, La Vallière, Madame peut-être, mademoiselle de Laval, madame de Soubise, qui à vingt-neuf ans avoit huit enfants et restoit belle ; madame de Montespan, la belle Ludres, madame d’Heudicourt, madame de Monaco, mademoiselle