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après la mort du maréchal son père et de son frère aîné, devint amoureux de mademoiselle de Boutteville ; et parceque le prince de Condé en devint amoureux aussi, Coligny le

    les Prétieuses de Somaize (t. 1, p. 191) cette prédiction, qui s’applique à madame de Châtillon sous le nom de Camma (1661) : « L’amour se deffera de sa puissance entre les mains de Camma et luy donnera tout ce qu’il possède, ce qui s’appellera du nom de Métamorphose galante. »

    Presque partout nous citons Somaize : c’est que tout notre monde a vécu de la vie précieuse, c’est que tous ces libertins et toutes ces femmes légères ont filé dans les ruelles le parfait amour avant de passer si chaleureusement à la réalité. Les lettres et les dialogues de Bussy, s’ils ne sont pas authentiques, sont parfaitement vraisemblables. Ainsi s’exprimoit la galanterie la plus hardie. Madame de Châtillon « faisoit la prude (Conrart, p. 231) et la sévère plus qu’aucune autre dame. » Elle étoit Montmorency, elle étoit Coligny elle avoit du sang d’azur dans les veines ; elle se sentoit duchesse et bel-esprit. Mademoiselle Desjardins a écrit pour elle le Triomphe d’Amarillis ; elle y passe divinité et y trône sur les nuages. Nous sommes loin des gourgandines de Régnier avec ce monde beau parleur ; nous sommes loin aussi des vigoureuses passions de l’Italie ou de l’Espagne. Peu s’en faut que madame de Châtillon ne figure parmi les dévotes. Parmi les pièces justificatives de l’Histoire de madame de Longueville par M. V. Cousin, il y a quelques lettres de Madame de Longueville, de la princesse douairière et de Madame de Châtillon : ce sont des mères de douleur, des colombes chrétiennes ; elles parlent le mielleux langage de saint François de Sales. On a quelque peine à tenir ses lèvres pincées lorsqu’on voit madame de Châtillon déposer solennellement en faveur de la sainteté de la mère Magdelaine de Saint-Joseph (1655), religieuse carmélite dont on poursuivoit à Rome la béatification.

    Parlons d’abord de son second mari, de celui qui lui donna le nom de Meckelbourg, pour qu’il n’y ait plus qu’à songer librement à madame de Châtillon. C’est en février 1664, à trente-huit ans, qu’elle l’épousa. Christian-Louis de Meckelbourg (Mecklembourg)-Schwerin, chevalier de l’ordre le 4 novembre 1663, étoit veuf et avoit à peu près le même âge