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êtes traité, lui dit-il, comme vous méritez ; mais, puisque la comtesse n’a pas eu de considération pour nous, ajouta-t-il se tournant du côté du chevalier, nous ne sommes pas obligés d’en avoir pour elle. Nous voyons bien qu’elle nous a sacrifiés, mais il y a eu des temps, chevalier, où vous l’avez été aussi ; nous avons grand sujet de nous plaindre d’elle, mais vous n’en avez point du tout de vous en louer ; quand nous nous sommes réjouis quelquefois à vos dépens, la comtesse a été pour le moins de la moitié avec nous. — Il est vrai, reprit le comte de Guiche, que vous n’auriez pas raison d’être satisfait de la préférence de la comtesse en votre faveur si vous saviez l’estime qu’elle fait de vous, et cela me fait tirer des conséquences infaillibles qu’elle est fort entre vos mains, puisque après les choses qu’elle m’a dites elle ne me trahit que pour vous satisfaire. Hé bien ! chevalier, jouissez en repos de cette perfide. Si personne ne vous trouble que moi, vous vivrez bien content auprès d’elle. » Là-dessus, s’étant tous trois réconciliés de bonne foi et donné mille assurances d’amitié à l’avenir, ils se séparèrent.

Le comte de Guiche et Manicamp s’enfermèrent pour faire une lettre de reproche à la comtesse au nom de Manicamp, sur quoi la pauvre comtesse, qui était innocente, lui répondit que son ami et lui avoient été pris pour dupes, et que le chevalier en savoit plus qu’eux ; qu’elle ne leur pouvoit mander comme il avoit eu la lettre qu’il leur avoit montrée, mais qu’un jour elle leur feroit voir clairement qu’elle ne les avoit point sacrifiés. Cette lettre ne trouvant plus