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se trouve à la porte de sa maison, entouré d’une foule nombreuse de Brâhmanes, de Kchattiyas, de Vâiçyas, de Çûdras, dont il reçoit les hommages, assis sur un grand trône que soutient un piédestal orné d’or et d’argent ; qu’il soit occupé à des affaires de milliers de kôtis de Suvarnas, éventé par un chasse-mouche, sous un vaste dais dressé sur un terrain jonché de fleurs et de perles, auquel sont suspendues des guirlandes de pierreries, entouré en un mot de toute la pompe de l’opulence. Que le pauvre homme, ô Bhagavat, voie son propre père assis à la porte de sa maison, au milieu de cet appareil de grandeur, environné d’une foule nombreuse de gens, occupé aux affaires d’un maître de maison ; et qu’après l’avoir vu, effrayé alors, agité, troublé, frissonnant, sentant ses poils se hérisser sur tout son corps, hors de lui, il réfléchisse ainsi : Sans contredit, le personnage que je viens de rencontrer est ou le roi, ou le ministre du roi. Je n’ai rien à faire ici ; allons-nous-en donc. Là où est le chemin des pauvres, c’est là que j’obtiendrai des vêtements et de la nourriture sans beaucoup de peine. J’ai tardé assez longtemps ; puissé-je ne pas être arrêté ici et mis en prison, ou puissé-je ne pas encourir quelque autre disgrâce !

Qu'ensuite le pauvre homme, ô Bhagavat, en proie à la crainte produite sur son esprit par la succession des malheurs [qu’il appréhende], s’éloigne en grande hâte, s’enfuie, ne reste pas en ce lieu. Qu’en ce moment l’homme riche, assis à la porte de sa maison sur un trône, reconnaisse à la première vue son propre fils, et que l’ayant vu, il soit satisfait, content, ravi, plein de joie, de satisfaction et de plaisir, et qu’il fasse cette réflexion : Chose merveilleuse ! le voilà donc trouvé celui qui doit jouir de cette grande fortune en or, en Suvarnas, en richesses, en grains, en trésors, en greniers et en maisons ; j’étais sans cesse occupé à songer à lui : le voici qui arrive de lui-même, et moi je suis âgé, vieux, cassé.

Qu’ensuite cet homme, ô Bhagavat, tourmenté par le désir de voir son fils, envoie en ce moment, en cet instant même, à sa poursuite des coureurs rapides : Allez, mes amis, amenez-moi bien vite cet homme. Qu’alors ces hommes partant tous rapidement, atteignent le pauvre ; qu’en ce moment le pauvre effrayé, agité, troublé, frissonnant, sentant ses poils se hérisser sur tout son corps, hors de lui, pousse un cri d’effroi ; qu’il se désole, qu’il s’écrie : Je ne vous ai fait aucun tort. Que les hommes entraînent de force le pauvre, malgré ses cris. Qu'ensuite le pauvre,