Page:Burnouf - Lotus de la bonne loi.djvu/68

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

frappés tous ensemble par une grande douleur, ils ne songent pas à la douleur et ne conçoivent pas l’idée de sortir.

Que cet homme, ô Çâriputtra, soit fort et qu’il ait de grands bras, et qu’il fasse cette réflexion : Je suis fort et j’ai de grands bras ; ne pourrais-je pas, rassemblant mes enfants et les serrant tous à la fois sur ma poitrine, les faire sortir de cette maison. Puis, qu’il fasse cette autre réflexion : Cette maison n’a qu’une entrée ; la porte en est étroite. Et ces enfants légers, toujours en mouvement, ignorants de leur nature, il est à craindre qu’ils ne se mettent à tourner de côté et d’autre ; ils vont périr misérablement dans ce grand incendie ; pourquoi ne m’empresserais-je pas de les avertir ? S’étant donc arrêté à ce parti, il appelle ses enfants qui étaient sans réflexion : Venez, mes enfants, sortez ; la maison est embrasée par un grand incendie ; puissiez-vous n’y pas rester tous consumés par ce grand incendie ! Regardez : le danger s’approche ; vous allez y périr. Mais ces enfants ne font pas attention au discours de cet homme, qui parle dans leur intérêt ; ils ne s’effrayent pas, ils ne tremblent pas, ils n’éprouvent pas d’effroi, ils n’y pensent pas, ils ne fuient pas ; ils ne savent pas même, ils ne comprennent pas ce que c’est que ce qu’on appelle embrasé ; bien au contraire, ils courent, ils se dispersent çà et là et regardent leur père à plusieurs reprises. Pourquoi cela ? C’est que ce sont des enfants ignorants.

Qu’ensuite cet homme fasse encore cette réflexion : Cette maison est embrasée par un grand incendie, elle est consumée ; puissé-je, moi et mes enfants, ne pas trouver ici misérablement la mort dans ce grand incendie ! Ne pourrais-je pas, par l’habile emploi de quelque moyen, faire sortir mes enfants de cette maison ? Que cet homme connaisse les dispositions de ses enfants ; qu’il comprenne leurs inclinations. Qu’il y ait plusieurs jouets de diverses espèces qui soient recherchés, aimés, désirés, estimés de ces enfants ; qu’ils soient difficiles à obtenir. Qu’alors cet homme, connaissant les inclinations de ses enfants, s’adresse à eux en ces termes : Ces jouets, ô mes enfants, qui vous sont agréables, qui excitent votre étonnement et votre admiration, que vous êtes désolés de ne pas posséder, ces jouets de diverses couleurs et de diverses espèces, comme, par exemple, des chariots attelés de boeufs, de chèvres, d’antilopes, qui sont recherchés, aimés, désirés, estimés par vous, je les ai tous mis dehors, à la porte de la maison, pour servir à vos jeux. Accourez, sortez de cette maison ; je donnerai à chacun