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APPENDICE. — N° VIII.

26. Adînagâtraḥ ; V29 adâm̃bagâtraḥ ; H28 adînagâtratâ ; D24 atchinagattatâ. Ce caractère signifie, « Ses membres ne sont pas pauvres, » ou, comme le disent les Tibétains, « Son corps est exempt d’abattement. » Les listes du Népâl et de Ceylan sont d’accord sur la valeur de cet attribut ; car la leçon atchîna est, selon toute apparence, une faute pour adîna, et je m’aperçois même que dans mon manuscrit le signe du tchî est surchargé et peu lisible. Le Vocabulaire pentaglotte est plus gravement incorrect, et la traduction que proposait A. Rémusat pour cet article, « membres sans courbure, » donnerait à supposer qu’il faut trouver adambha dans adâm̃ba ; mais, correction pour correction, je préfère encore supposer que le copiste du Vocabulaire pentaglotte a eu sous les yeux et a mal transcrit adîna, le même terme que les autres listes. Je ne crois pas d’ailleurs que adambha puisse être employé au sens physique.


27. Anunnatagâtraḥ ; V30 utsadagâtraḥ ; H29 utsâhagâtratâ ; D23 anussannâsannasabbagattatâ. Ce caractère signifie : « Ses membres n’offrent pas de saillie. » Les Tibétains disent, « Son corps est bien régulier, » ce qui me paraît un peu trop vague. Cet article d’ailleurs exige une attention particulière à cause de la divergence que présentent les énoncés des diverses listes. La traduction que je viens de donner se rapporte au texte du Lalita vistara ; mais elle serait inexacte pour les trois autres définitions. Ainsi celle du Vocabulaire pentaglotte ne peut signifier autre chose que, « Il a les membres rebondis, » et c’est à peu près de cette manière que l’entendait A. Rémusat, quand il traduisait : « corps d’un embonpoint suffisant et agréable[1]. » La leçon de la liste népâlaise est certainement moins satisfaisante ; « la qualité d’avoir les membres de l’effort, » sans doute pour dire, « des membres vigoureux, » nous éloigne trop de l’idée que nous devons chercher dans ce caractère ; mais de plus utsâha paraît n’être qu’une faute pour utsada. Enfin l’énoncé des Singhalais reproduit en partie celui du Lalita vistara avec un degré de précision de plus, car il signifie : « Tous ses membres sont sans saillie et sans dépression. » Le composé anassannâsanna, que je divise ainsi, anussanna âsanna, est pour moi synonyme du composé sanscrit unnatânata, « inégal, onduleux[2], » composé dont la leçon du Lalita vistara nous offre la première partie, La leçon des Singhalais me paraît même si satisfaisante, que j’irais jusqu’à supposer que celle du Lalita vistara n’en est qu’une sorte de fractionnement, et qu’on rétablirait l’énoncé primitif en lisant anunnatânatagâtraḥ, « celui dont les membres sont sans saillie et sans dépression. » Quant au Vocabulaire pentaglotte et à la liste népâlaise, je crois leurs leçons fautives, en présence de celles du Dharma pradîpikâ singhalais et même du Lalita vistara tibétain ; il est certainement question ici d’un mérite exprimé sous la forme de la négation d’un défaut.


28. Susamâhitagâtraḥ ; V31 susam̃hatagâtraḥ ; D28 kôṭisohassahat­thibalodhâraṇatâ. Ce caractère signifie, « Ses membres sont parfaitement achevés ; » et, suivant les Tibétains, « Son corps est remarquable par sa vigueur. » Il est évident que, pour traduire ainsi, ils avaient sous les yeux une autre leçon que susamâhita ; et cette autre leçon devait être

  1. Mélanges asiat., t. I, p. 171.
  2. Amarakocha, liv. III, chap. ii, st. 19, p. 255, éd. Loiseleur.