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APPENDICE. — N° III.

et moins systématique du Maître. Pour des doctrines qui ne furent conservées pendant longtemps que par la tradition orale, de telles catégories étaient un précieux secours ; elles résumaient, en quelques mots faciles à retenir par le chiffre auquel on les rattachait, des développements dont l’étendue eût pu échapper à la mémoire des auditeurs ; et réciproquement pour nous, dans l’ignorance où nous sommes touchant la forme primitive des plus anciennes autorités écrites du Buddhisme, la présence de ces listes au milieu de traités reçus pour canoniques, doit nous porter à croire que ces traités se transmirent pendant longtemps d’un maître à l’autre par l’enseignement oral, avant d’être fixés définitivement par l’écriture.

Je serai plus bref sur les deux dernières sections dont se compose le Sâmannâ phala sutta, savoir, la Samâdhi ou la méditation, et la Paññâ ou la sagesse. En effet ces deux sujets appartiennent à une partie différente de la doctrine de Çâkya, et j’aurai occasion de les examiner en détail dans deux autres notes de cet Appendice, dans celles qui portent sur les Dhyânas ou degrés de contemplation et sur les Vimôkkhas ou moyens d’affranchissement. Je remarquerai seulement ici que ces sujets plus relevés, sont généralement traités ainsi à la suite de la morale ; il est rare, au moins dans les Suttas des Singhalais, de les voir séparés de la pratique des vertus qui en forment comme le premier degré.

No III.
SUR LE BÔDHISÂTTVÂ MAÑDJUÇRÎ.
(Ci-dessus, chap. i, f. 2 b, p. 301.)

Je vais résumer ici, comme je m’y suis engagé dans la note de la page 301, ce que la tradition népâlaise nous apprend de ce personnage si célèbre chez les Buddhistes du Nord, et particulièrement chez les Népâlais. En comparant avec soin les renseignements relatifs au Bôdhisattva Mañdjuçrî qui ont été publiés jusqu’à ce jour d’après les sources mongoles, tibétaines, chinoises et népâlaises, il est aisé de reconnaître que Mañdjuçrî s’y montre sous un double caractère, celui d’un personnage divin, ou plus exactement, mythologique, et celui d’un Religieux ou d’un chef qui a pu réellement exister dans le Nord-Est de l’Inde, où il paraît avoir exercé une influence considérable sur la propagation du Buddhisme. Mais il n’est pas également facile de séparer nettement ces deux caractères, c’est-à-dire de faire voir s’ils se sont développés successivement l’un de l’autre, ou s’ils doivent leur existence à deux traditions primitivement indépendantes qui se seraient réunies plus tard.

Quand on étudie, par exemple, les documents rassemblés par I. J. Schmidt d’après les auteurs mongols, le rôle mythologique de Mañdjuçrî se trouve si mêlé à son rôle d’instituteur religieux, qu’il est malaisé de dire où cesse la réalité et où commence la fable. Ainsi Mañdjuçrî est invoqué en qualité de Guru, c’est-à-dire de précepteur spirituel, sous le nom de Mañdjughôcha, au commencement de l’histoire des Mongols de Sanang