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LE LOTUS DE LA BONNE LOI.

de la main les deux astres du soleil et de la lune si puissants, si énergiques ; il atteint avec son corps même jusqu’au monde de Brahmâ.

« De même, grand roi, qu’un habile potier, ou que l’aide habile d’un potier, qui, une fois son argile préparée convenablement, saurait en faire tel ou tel vase qu’il voudrait ; ou encore de même qu’un habile ouvrier en ivoire, ou l’aide habile de cet ouvrier, une fois son ivoire préparé convenablement, saurait lui donner telle forme qu’il désirerait ; de même qu’un habile orfévre, ou que l’aide habile d’un orfévre, une fois son or préparé convenablement, saurait lui donner telle forme qu’il désirerait ; de la même manière, grand roi, le Religieux voyant son esprit ainsi recueilli, [etc. comme ci-dessus, jusqu’à] arrivé à l’impassibilité, dirige son esprit, tourne son esprit vers la mise en action des facultés magiques, [etc. comme ci-dessus, jusqu’à] il atteint avec son corps même [f. 21 b] jusqu’au monde de Brahmâ. * Cela même lui est compté comme sagesse. * C’est là, grand roi, un résultat général et prévu qui est et plus éminent et plus précieux que les autres résultats généraux et prévus dont il a été parlé précédemment.

« Le Religieux voyant son esprit ainsi recueilli, [etc. comme ci-dessus, jusqu’à] arrivé à l’impassibilité [f. 54 a], dirige son esprit, tourne son esprit vers l’élément de l’ouïe divine. Avec cet élément de l’ouïe divine parfaitement pure, qui surpasse l’ouïe humaine, il entend ces deux espèces de sons, les sons divins et les sons humains, ceux qui sont éloignés comme ceux qui sont rapprochés. De même, grand roi, qu’un homme qui serait en route entendrait le son du tambour, celui du tambourin d’argile, celui de la conque, du tambour de guerre, du Dêṇḍima[1], et ferait cette réflexion : Voici le son du tambour, voici celui du tambourin d’argile, voici celui de la conque, du tambour de guerre, du Dêṇḍima ; de la même manière, grand roi, le Religieux voyant son esprit ainsi recueilli, [etc. comme ci-dessus, jusqu’à] entend ces deux espèces de sons, les sons divins et les sons humains, ceux qui sont éloignés, comme ceux qui sont rapprochés.* Cela même lui est compté comme sagesse. * C’est là, grand roi, un résultat général et prévu qui est et plus éminent et plus précieux que les autres résultats généraux et prévus dont il a été parlé précédemment.

« Le Religieux voyant son esprit ainsi recueilli, [etc. comme ci-dessus, jusqu’à] arrivé à l’impassibilité, dirige son esprit, tourne son esprit vers la connaissance, de l’esprit des autres. Pénétrant avec son esprit l’esprit des autres êtres, des autres individus, il le connaît, qu’il soit passionné, et il se dit : Voilà un esprit passionné ; ou bien qu’il soit exempt de passion, et il se dit : Voilà un esprit exempt de passion ; qu’il soit entaché de péché ou exempt de péché, livré à l’erreur ou libre d’erreur, concentré ou dispersé, ayant un grand but ou n’ayant pas un grand but, inférieur ou supérieur [f. 22 a], recueilli ou non recueilli, affranchi, et il se dit : Voilà un esprit affranchi ; ou non affranchi, et il se dit : Voilà un esprit non affranchi. De même, grand roi, qu’une femme ou un homme encore enfant, encore jeune, dans l’âge où l’on aime à se parer, qui verrait son visage soit dans un miroir

  1. Le Dêṇḍima est-il un autre nom du sanscrit dundubhi, « espèce de grande timbale, ou de tam-tam, » comme le mutig̃ga, « tambourin, » est le classique mrĭdañga ? On sait qu’en singhlais dêṇḍima serait le nom verbal de la racine qui signifie parler ; mais ce sens n’a rien à faire ici.