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NOTES.

sage du Brahmadjâla sutta, où il ne peut avoir d’autre sens que celui de contradictoire, hostile. Au commencement de ce traité, le Brâhmane Suppiya (Supriya) et son disciple Brahmadatta sont représentés l’un attaquant, l’autre défendant le Buddha, ce que le texte résume ainsi : Itiha te ubhô âtchariyantévâsî aññamaññassa udjuvipatchtchani­kavâdâ bhagavantam̃ piṭṭhitô piṭṭhitô anubaddhâ hônti. « C’est ainsi que tous les deux, le maître et le disciple, ils marchaient sur les pas de Bhagavat, disputant entre eux avec des discours, les « uns justes, les autres hostiles[1]. » Des deux formes vipratyanîyâka et apratyanîka, c’est la seconde qui est la plus fréquemment employée ; elle a de plus l’avantage de trouver son analogue dans le pâli vipatchtchanika.

Autrefois.] Le texte se sert ici de l’expression atilê’dhvani, littéralement, « dans une route passée. » Le terme de adhvan est très-fréquemment employé dans le sanscrit buddhique pour exprimer les voies dans lesquelles s’accomplissent les actions, c’est-à-dire le passé, le présent et l’avenir. Je remarque que les livres réputés canoniques et les commentaires s’occupent à chaque instant de cette triple division de la durée, et c’est, d’après un texte cité dans le commentaire sur l’Abhidharmakôça, un des sujets les plus importants dont les sages puissent s’entretenir : « Il y a, ô Religieux, trois sujets de discours, et non quatre et non cinq, que les Âryas prennent pour objet des entretiens auxquels ils se livrent. « Et quels sont ces trois sujets ? Ce sont le sujet du passé, le sujet de l’avenir, le sujet du présent[2]. » L’avenir se nomme anâgaté ’dhvani, et le présent pratyutpannê ’dhvani. Ces dénominations sont également familières aux Buddhistes du Sud.

Bien avant des Kalpas.] On sait qu’un Kalpa est, pour les Buddhistes comme pour les Brâhmanes, une période comprenant la durée d’un monde. Il y a diverses espèces de périodes de ce genre, lesquelles ont été décrites par les auteurs qui se sont occupés du Buddhisme d’après les Chinois et les Mongols, les Singhalais et les Barmans. Je pourrais me contenter de renvoyer aux recherches de Deshauterayes, Rémusat, Schmidt, Joinville, Sangermano et Turnour, qui ont traité de ce sujet avec plus ou moins de développements ; toutefois plusieurs de ces exposés offrent entre eux des divergences que je n’ai sans doute pas la prétention de concilier, mais sur lesquelles je crois devoir appeler l’attention du lecteur. Suivant Deshauterayes et Rémusat, chaque Kalpa ou période de la durée d’un monde se décompose en deux divisions ou époques, l’une d’accroissement, l’autre de diminution. La vie des hommes étant sujette, selon les Buddhistes, à une double marche, l’une d’accroissement et l’autre de diminution, dont la première la porte à quatre-vingt-quatre mille ans et dont la seconde la réduit à dix, quand la vie humaine diminue, le Kalpa se nomme de décroissement, et quand elle s’augmente, il se nomme d’accroissement[3]. On distingue trois espèces de Kalpas, le petit qui comprend 16,800,000 années, le moyen qui en comprend 336,000,000, et le grand 1,344,000,000. Le moyen Kalpa

  1. Brahmadjâla sutta, dans Dîgh. nik. fol. 1 a de mon manuscrit.
  2. Abhidharma kôça vyâkhyâ, fol. 17 b.
  3. Recherches sur la relig. de Fo, dans Journ. asiat. t. VIII, p. 182 ; Foe koue ki, p. 132 ; I. J. Schmidt, Geschichte der Ost-Mongolen, p. 304 et suiv.