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sagesse et tu n’es pas instruit. Puis, qu’ils lui parlent de cette manière ; Quand tu es assis, ô homme, dans l’intérieur de ta maison, tu ne vois pas, tu ne connais pas les autres formes qui sont au dehors ; tu ne distingues pas les êtres, selon qu’ils ont des pensées bienveillantes ou hostiles [pour toi] ; tu ne perçois pas, tu n’entends pas à la distance de cinq Yôdjanas le bruit de la conque, du tambour ou de la voix humaine ; tu ne peux te transporter, même à la distance d’un Krôça[1] sans te servir de tes pieds ; tu as été engendré et tu t’es développé dans le ventre de ta mère, et tu ne te rappelles rien de tout cela. Comment donc es-tu savant, et comment connais-tu tout, et comment peux-tu dire : Je vois tout ? Reconnais donc bien, ô homme, que ce qui est la clarté est l’obscurité ; reconnais encore que ce qui est l’obscurité est la clarté.

Qu’ensuite cet homme parle ainsi à ces Richis : Quel moyen faut-il que j’emploie, ou quelle bonne œuvre faut-il que je fasse, pour acquérir une pareille sagesse ? Puissé-je, par votre faveur, obtenir ces qualités ! Qu’alors ces Richis parlent ainsi à cet homme : Si tu veux cela, pense à la loi, assis dans le désert, ou dans la forêt, ou dans les cavernes des montagnes, et affranchis-toi de la corruption [du mal]. Alors, doué de qualités purifiées, tu obtiendras les connaissances surnaturelles. Qu’ensuite cet homme, suivant ce conseil, entrant dans la vie religieuse, habitant dans le désert, la pensée fixée sur un seul objet, s’étant affranchi de la soif du monde, obtienne les cinq connaissances surnaturelles ; et qu’ayant acquis ces connaissances, il réfléchisse ainsi : La conduite que j’ai suivie antérieurement ne m’a mis en possession d’aucune loi ni d’aucune qualité. Maintenant, au contraire, je vais comme le désire ma pensée ; auparavant je n’avais que peu de sagesse, que peu de jugement ; j’étais aveugle.

Voilà, ô Kâçyapa, la parabole que je voulais te proposer, pour te faire comprendre le sens de mon discours ; voici maintenant ce qu’il faut y voir. L’expression d’aveugle de naissance, ô Kâçyapa, désigne les êtres qui sont renfermés dans la révolution du monde, où l’on entre par cinq voies ; ce sont ceux qui ne connaissent pas l’excellente loi et qui accumulent [sur eux-mêmes] l’obscurité et les ténèbres épaisses de la corruption [du mal], ils sont aveuglés par l’ignorance, et dans cet état d’aveuglement, ils recueillent les conceptions ainsi que le nom et la forme qui sont l’effet des

  1. Quatre cent coudées.