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PRÉFACE.

Comment des histoires dont les Dieux et les rois devaient être les principaux héros, ont-elles fait place à des légendes qui n’ont guère qu’un but religieux et moral ? Serait-ce que toutes les traditions, qui avaient reçu de la bouche des Bardes une forme épique, se seraient réfugiées dans le Mahâbhârata, cette grande collection d’épopées, chantée aussi par un Sûta, et plus vaste à elle seule que toutes les épopées européennes réunies ensemble ? Ce sont là des questions curieuses sans doute, mais encore fort obscures. Sans vouloir contester le droit qu’a l’érudition de les examiner, je ne crains pas de dire que le moment de les résoudre n’est pas encore venu. Il est presque inutile d’observer que l’examen d’une question littéraire suppose la connaissance du monument sur lequel elle porte. Et sur quoi, nous pouvons le demander, reposerait maintenant la solution, quelque ingénieuse qu’elle fut, des questions relatives à des livres qu’on ne connaît encore qu’aussi imparfaitement ?

Ce qu’il importé en ce moment de constater, c’est que le corps des Purâṇas ou la collection des traditions anciennes paraît avoir subi, à des époques qu’on peut espérer de déterminer plus tard, des modifications dont il est jusqu’à présent impossible d’apprécier l’étendue. Ce fait, ce n’est pas l’autorité seule de M. Wilson, quelque grande qu’elle soit, qui m’engage à l’admettre ; c’est d’abord le témoignage des Brâhmanes eux-mêmes, qui nous ont conservé, sur l’état primitif des Purâṇas, des détails précieux et auxquels ne répond pas exactement la forme actuelle de ces livres. C’est ensuite le désaccord qui existe entre la définition ordinaire, et je dirais presque classique, du nom de Purâṇa, et la nature des matériaux dont la plupart des Purâṇas sont aujourd’hui composés. Le témoignage des Brâhmanes que j’invoque d’abord m’est fourni par le Bhâgavata même dans un passage dont je me con-