qu’elle est signalée au lecteur, et que la vérité qu’elle altère se trouve rétablie par la critique.
C’est à la critique, en effet, qu’il appartient d’apprécier l’importance du fait sur lequel repose la discussion précédente, fait dont la valeur historique et littéraire n’a pas échappé à la sagacité de M. Wilson[1]. De quelque merveilleux que l’imagination indienne se soit plu à l’entourer, il n’en paraît pas moins avec son véritable caractère dans ces seuls mots qui forment le point de départ et le terme de presque tous les Purâṇas : « le Barde a dit. » Et quand on pense que le Sûta ou le Barde indien est, suivant la loi de Manu[2], le fils d’un Kchattriya et d’une femme de la caste brâhmanique, on comprend qu’il ait pu réunir les deux rôles d’écuyer et de chantre des héros, et que le même personnage ait pu célébrer, comme Brâhmane, les actions des Kchattriyas qu’il accompagnait comme guerrier sur le champ de bataille. Ce fait nous reporte aux premiers âges de la société indienne, lorsqu’elle conservait encore ce caractère martial qui brille d’une splendeur si vive dans le Mahâbhârata, malgré les efforts que paraît avoir faits le génie brâhmanique pour l’éteindre dans le calme et dans le silence des spéculations de la plus profonde théosophie. Des traits de ce genre font pénétrer quelques lueurs au sein de l’obscurité qui nous cache les premiers âges de l’histoire de l’Inde. Ils percent cette enveloppe brâhmanique qui recouvre la vieille société guerrière des Kchattriyas, société où déjà sans doute existaient en germe toutes les facultés de l’esprit indien, mais où elles n’avaient pas encore pris le développement exagéré que leur a donné la prédominance, usurpée sans doute depuis longtemps, de la caste des Brâhmanes.