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faire, que cette caste a joué un rôle important dans l’histoire de la transmission des Purâṇas[1].

Le compilateur du Mahâbhârata, ce vaste et précieux recueil des traditions épiques de l’Inde ancienne, cite à chaque instant le nom de Puraṇa, surtout au commencement du premier livre, dont la rédaction encore vague et confuse, porte la trace des efforts faits par les Brâhmanes pour recueillir et lier entre elles les histoires héroïques et religieuses des premiers temps. Les termes d’Itihâsa et de Purâṇa s’y rencontrent non-seulement placés l’un auprès de l’autre, ainsi que dans les passages précités des Védas et de Manu, mais encore employés comme synonymes ; et le Mahâbhârata lui-même qui parait, dans l’introduction qui en forme le préambule, avec son titre spécial d’Itihâsa, y reçoit

  1. Dans un autre passage, l’écuyer royal raconte à son maître la légende de Rĭchyaçrĭg̃ga, qu’il a entendue autrefois dans une assemblée de Brâhmanes. D’après la rédaction des éditeurs de Sérampour, cette légende aurait fait partie d’un Purâṇa, ou, comme dit la traduction anglaise, d’une ancienne chronique. (Voy. Râmâyaṇa, t. I, pag. 117, edit. Séramp.) Mais comme la leçon n’est pas la même dans la rédaction de M. de Schlegel, et que l’on peut à la rigueur traduire पुराणे par olim, comme a fait cet habile indianiste (Râmâyaṇa, t. I, p. 34, trad. lat.), je ne veux pas insister sur la présence de ce mot, et en conclure qu’il est ici question d’un Purâṇa proprement dit. Du reste, quelque opinion que l’on se fasse sur ce texte, dans lequel j’aimerais mieux croire, pour ma part, qu’il s’agit de ce qu’on peut nommer d’une manière générique le Purâṇa (comme on dit le Vêda), c’est-à-dire la collection des anciennes légendes, je suis toujours autorisé à le regarder comme un de ceux qui prouvent que les écuyers remplissaient auprès des Kchattriyas les fonctions de Bardes, ce qui résulte également du rôle que, dans le Mahâbhârata, Sam̃djaya joue auprès de Dhrĭtarâchṭra. Si l’on s’en rapportait uniquement à la traduction de Sérampour, on pourrait croire que le nom de Purâṇa se trouve encore au liv. II, sect. 50, t. III, p. 80, car on y lit ces mots : « the purified Pouranicks, » et, en note, ce dernier terme est expliqué ainsi : « those who repeat the Poorânas. » Le nom de Purâṇa n’est cependant pas cité dans le texte ; mais il y est question des Sûtas ou Bardes, et l’indication de la fonction qui leur appartient en propre, celle de réciter les Purâṇas, est vraisemblablement empruntée à un commentateur. Elle n’en est pas moins curieuse, en ce qu’elle montre combien est générale l’opinion dont je parlerai tout à l’heure, que c’est à la caste des Bardes qu’est due primitivement la transmission des Purânas.