Page:Burnouf - Le Bhâgavata Purâna, tome 1.djvu/23

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ou récits traditionnels. C’est ainsi que le seul passage de Manu où se rencontre le nom de Purâṇa, nous le montre placé immédiatement après celui d’Itihâsa[1] comme le donnent le Bhâgavata et d’autres ouvrages[2].

Un poëme qui, de même que le recueil de Manu, peut prétendre à une haute antiquité, le Râmâyaṇa, cite également les Purâṇas, dans un passage tout à fait caractéristique, et qui ne permet pas de douter que ce terme n’ait désigné, selon l’auteur du Râmâyana, les légendes anciennes qui sont réunies sous le titre général de Purâṇa. Dans ce passage, l’écuyer et le Barde royal est représenté remplissant la seconde de ses fonctions, et se rendant le matin au palais de Daçaratha pour le réveiller. Le poëte alors le caractérise par l’épithète de Purâṇavit, que les éditeurs de Sérampour ont traduite par versed in ancient records[3], et M. de Schlegel par veteris memoriœ gnarus[4]. Je regarde ces traductions comme parfaitement exactes, et je ne veux pas tirer de la présence d’une épithète comme celle de Purâṇavit, la conséquence que le mot de Purâṇa désigne les ouvrages que nous possédons aujourd’hui sous ce titre. Mais je me crois en droit d’en conclure qu’il existait au temps du Râmâyana des traditions que l’on appelait anciennes, et que la connaissance de ces traditions était l’apanage de la caste des écuyers. Cette conclusion acquerra aux yeux du lecteur un très-haut degré de vraisemblance, quand j’aurai montré, comme j’essayerai bientôt de le

  1. Manusaṁhitâ, l. III, st. 232.
  2. Bhâgavata, l. I, ch. iv, st. 20 et 23 ; l. III, ch. xii, st. 39 ; Vâichṇava Purâṇa, ms. beng. no  xii, fol. 1, l. 3 ; Vâyavîya Purâṇa, ms. bengali no  ix, fol. 2 r. l. 6 ; fol. 7 r. l. 3. La place que le mot d’Itihâsa occupe constamment avant celui de Purâṇa, du moins dans les textes qui me sont connus, n’est sans doute pas indifférente, et elle indique peut-être que le premier est plus ancien ou plus révéré que le second.
  3. Râmâyaṇa, t. II, p. 156 ; éd. Séramp.
  4. Râmâyaṇa, t. I, p. 351, texte ; et t. I, p. 290, trad. lat. ; éd. Schlegel.