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PRÉFACE.

poëte, qui croit à tout et qui admet tout. Mais c’est, il faut ie dire, à cette condition, que le Brahma et le Purucha du Vêdânta, le Hiranyagarbha des Upanichads, l’Içvara des sectateurs de Çiva, soient reconnus ou comme identiques avec Bhagavat, ou comme des manifestations de sa substance. A ce prix, il importe peu à lauteur que chaque école ou chaque secte ait fait prédominer sur toutes les autres son idée ou son Dieu ; ou pour mieux dire, plus les idées se sont élevées haut, plus les Dieux sont devenus suprêmes, moins il éprouve d’hésitation à les identifier avec ses conceptions et avec sa divinité.

C’est, je l’avoue, ce syncrétisme un peu grossier qui donne à notre poëme cette physionomie étrange dont un lecteur européen pourra s’étonner. Les identifications perpétuelles que le poète &it de Bhagavat avec les nombreux personnages de la tnytholc^e indienne, la profusion d’épithètes dont il se sert pour exprimer les attributs variés de son Dieu, les formes, quelquefois si inattendues, sous lesquelles il le représente, tout cela est bien fait pour dérouter les lecteurs que les procédés de l’esprit occidental pnt accoutumés à ne se plaire qu’au développement successif et régulier des conceptions de l’intelligence. Une synthèse aussi vaste et quelquefois aussi confiise ne se laisse pas aisémoit débrouiller, et il faut une grande habitude des idées qu’elle recèle pour y découvrir les rapports qui lient ces idées les unes aux autres, et pour distinguer dans la foule des détails les faits g^éraux qui doivent les dominer et les réunir en groupes. Mais ce défaut qui choquera d’autant moins qu’on sera déjà plus Êuniliàrisé avec quelques-unes des productions de l’Orient, est en général celui de presque toutes les compositions indiennes. G’esti’excès de la prîn* cipale qualité du génie brahmanique, la fécondité ; c’est l’abus d’une activité dont rien ne rè^e l’élan ; c’est l’usage exagéré de