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superstitions. La conservation de l’orthodoxie brâhmanique fut liée à ce système.

A leur arrivée sur l’Indus les Aryas formaient déjà une société mêlée où les classes supérieures seules étaient pures, tandis que la troisième contenait une proportion peut-être assez grande de sang étranger ; mais comme celle-ci était pourtant très-supérieure aux pauvres barbares (varvara) qu’elle trouva devant elle, tout le peuple conquérant n’eut pas de peine à les reléguer dans une quatrième caste et à s’en faire des esclaves.

Un fait analogue se passait dans l’Asie centrale, où les Mèdes, peuple mêlé, finirent par se trouver classés au-dessous des Perses, purs Aryas, qui furent les prêtres et les seigneurs de l’empire de Cyrus.

La même chose eut lieu dans de minimes proportions le long de l’Eurotas après l’arrivée des Doriens ; mais l’absence de races infimes y réduisit les castes à trois, Spartiates, Laconiens et Hilotes[1].

L’église latine et les sociétés modernes se trouvèrent, quant aux races, dans des conditions beaucoup plus complexes, après les invasions et la conversion des barbares ; cependant on voit que l’orthodoxie romaine fit alliance avec les conquérants, pour assurer sa prépondérance sur les anciennes populations. Plus tard les mésalliances, le progrès de la puissance populaire et le principe même du christianisme, qui est l’égalité des hommes devant Dieu, tendirent à confondre les races. La conquête toute récente encore du Nouveau-monde mit les races mêlées et presque unifiées de l’Europe en face des peaux-rouges et des noirs ; et il fallut ces révolutions sanglantes dont nous avons été témoins, pour empêcher des orthodoxies oppressives de consacrer dans

  1. Voyez sur les temps primitifs d’Athènes notre Légende athénienne.