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l’on y découvre la trace de dogmes plus anciens, représentés par des symboles plus grossiers.

En réalité il n’y a pas de religion âryenne primordiale ayant laissé un monument quelconque, au moyen duquel elle puisse nous être connue. On voit seulement qu’une même théorie se transmet à travers les siècles, revêtant des formes diverses et passant par des phases successives, qui sont autant de religions. Cette théorie ressort assez nettement des comparaisons que nous avons ébauchées : dans la religion chrétienne c’est la théorie du Christ ; dans le Vêda, c’est la théorie d’Agni. En la prenant telle qu’elle est dans le Recueil des hymnes indiens, on peut en suivre le développement dans les diverses religions qu’elle a successivement animées : en Orient, dans le brâhmanisme, puis dans le buddhisme ; plus à l’ouest, dans la religion de Zoroastre ; en Europe, dans les mythologies des anciens peuples grecs, latins, germains, et finalement dans le christianisme, qui les a remplacées et en partie absorbées.

A la rigueur, il ne serait pas nécessaire de supposer une action directe de l’Inde sur les peuples de la Méditerrannée pour s’expliquer comment les rites et les symboles du Vêda ont pu revivre chez les premiers chrétiens, car il y a ici un héritage commun de toute la race âryenne. Mais un assez grand nombre d’indices nous portent à croire qu’une telle influence s’est exercée à plusieurs reprises. Pour ne pas descendre trop près, de notre temps, je citerai le fait récemment découvert de la canonisation par l’Église chrétienne d’un grand personnage indien du VIe siècle avant notre ère. Il existe sous le titre de Barlaam et Josaphat un livre traduit successivement en arabe, en arménien, en hébreu, en latin, en français, en languedocien, en italien, en allemand, en irlandais, en suédois, en anglais, en espagnol, en bohémien, en polonais, et finalement en tagal, un des