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elle qu’une puissance hostile, dont il fallait s’affranchir. Les rapports que ces grandes religions semblent consentir à garder les unes avec les autres rompent entre elles toute parenté et prêtent à chacune d’elles une originalité en apparence presque absolue.

Quand on va plus loin vers le passé ou vers l’Orient, la prétention des vieilles religions à l’indépendance est plus positive encore. On ne saurait considérer comme une croyance populaire de la Grèce ancienne que les dieux fussent venus d’Égypte dans ce pays ; c’est une opinion d’Hérodote et rien de plus. Des recherches si multipliées de l’archéologie il résulte que les cultes grecs étaient locaux et indépendans les uns des autres, qu’ils ne conservaient point le souvenir d’une origine étrangère et lointaine, et que, dans chaque lieu on racontait une légende établissant l’autochthonie de la religion qu’on y pratiquait. Le plus loin que l’on remontât, c’était la Crète ou la Thrace, qui avaient été en effet deux centres de rayonnement ou de diffusion pour les cultes des Pélasges et des Hellènes ; mais personne ne disait que ces cultes fussent venus de la Haute-Asie s’établir en Occident. Au contraire on racontait comment Jupiter avait été nourri dans l’île de Crète, et cet Orphée que la science moderne croit reconnaître dans le Ribhou du Vêda, on le faisait naître dans un pays européen et partir de là avec les Argonautes pour la conquête de la Toison d’or. Chaque divinité grecque était regardée comme la fondatrice de son propre culte, Junon à Argos, Apollon à Delphes et à Délos, Neptune et Pallas à Athènes, et ainsi des autres.

Chez les Perses, la religion était attribuée à Dieu comme à son auteur. Ce Dieu « principe de la vie et de la science » qu’ils appelaient Ahura-Mazda, mot dont les Grecs ont fait Ὀρομάζδης, et les Persans modernes Ormuzd, avait lui-même dicté à son fidèle serviteur