Page:Burnouf - Introduction à l’histoire du bouddhisme indien.djvu/595

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
553
DU BUDDHISME INDIEN.

quer que les Buddhistes de Ceylan ont ici un ordre de Dieux, qu’Upham nomme Assanjasattkaya[1], et dont le titre pâli, si on le lit Asanyasatta, a la même signification que les Arangisattvas des Népâlais.

Au quatrième degré viennent les Avrĭhas, dont le nom n’est pas parfaitement clair ; il peut signifier « ceux qui ne croissent pas » ou « ceux qui ne font pas d’efforts. » La version chinoise du Vocabulaire penlaglotte, telle que l’entend M. A. Rémusat, donne à cette dernière interprétation la précision qui lui manque ; ce savant la rend, en effet, par spiritus sine cogitationibus[2], ou « le ciel où il n’y a pas de réflexion. » Je ne fais pas difficulté d’admettre ce sens, que je détermine avec un peu plus de netteté encore, en disant : « ceux qui ne font pas d’efforts (pour penser). » Quant à la traduction tibétaine de ce titre, on la trouve, après avoir épuisé les transpositions que j’ai signalées précédemment, sous cette forme Mi-tchhe-ha[3], composé qui ne me paraît susceptible que d’une seule signification, « celui qui n’est pas grand. » Mais cette signification ne se rapproche pas assez du primitif Avrĭha, pour que je ne soupçonne pas quelque erreur ; et je proposerais de lire Mi-mchhed-pa, ce qui d’après le Dictionnaire de Csoma pourrait se traduire par « ceux qui ne s’étendent pas, » avec le même degré de vague que le sanscrit Avrĭhas. C’est également la version qu’adopte M. Schmidt, d’après ses autorités mongoles, qui paraissent ici suivre pas à pas les Tibétains[4].

Au-dessus des Avrĭhas viennent les Atapas, « ceux qui n’éprouvent pas de douleurs. » Georgi les nomme en tibétain Mi-dung-ba[5] ; mais il ne traduit pas plus ce nom que les précédents. Je ne balance pas à rétablir ici la leçon que je crois la véritable, et à lire Mi-gdung-ba, « ceux qui sont exempts de souffrance, » exactement comme le Vocabulaire pentaglotte. Les Chinois entendent bien Atapa, et M. A. Rémusat traduit leur version de ces deux manières différentes, spiritus sine mœrore et « le ciel sans fatigue[6]. » M. Schmidt traduit de même ce nom par « les Dieux exempts de souffrance. »

Viennent ensuite, au sixième degré, les Sudrĭças, « ceux qui voient bien ; » ce sont les Chin-tu-mtho-ba de Georgi[7], leçon que je corrige ainsi, Chin-tu-mthong-ba, pour traduire « ceux qui voient parfaitement. » Le Vocabulaire pentaglotte déplace cette interprétation, en la mettant sous l’article qui suit, et ré-

  1. The Mahâvansi, t. III, p. 136.
  2. Vocab. pentagl., sect. liii, n° 4. Foe koue ki, p. 146.
  3. Alphab. Tib., p. 182 ; et p. 485, n° 25 ; et Mitchhe, dans le Vocab. pentagl., sect. liii, n° 5.
  4. Mém. de l’Acad. des sciences de S.-Pétersbourg, t. I, p. 103 ; et t. IV, p. 217.
  5. Alphab. Tib., p. 182 et 485, n° 26.
  6. Vocab. pentagl., sect. liii, n° 5. Foe koue ki, p. 146.
  7. Alphab. Tib., p. 182 ; et p. 485, n° 27.