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DU BUDDHISME INDIEN.
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que nous ne possédons malheureusement pas à Paris. Les sujets traités dans ce livre sont la cosmographie, l’astronomie, la chronologie, à laquelle est jointe la description de quelques Dieux. On y trouve l’indication de diverses époques et des calculs chronologiques ; il y est parlé de la Mecque, ainsi que de l’origine, des progrès et du déclin du Mahométisme. L’ouvrage passe pour émané du suprême Âdibuddha, ou de ce premier Buddha, être abstrait qui répond, comme je l’ai dit, au Brahmâ des orthodoxes : « C’est, dit Csoma, le premier ouvrage original relatif au système Tantrika, qui ait été rédigé dans le Nord, dans une ville probablement fabuleuse du nom de Shambala, près du Sihoun (la Sîtâ). De là il fut introduit dans l’Inde au xe siècle, et dans le Tibet au xie[1]. » On voit que ce Tantra est très-moderne ; mais il renferme des traditions qui peuvent ne pas avoir laissé de traces dans des livres plus anciens.

Le même genre de mérite recommande l’Arya Mañdjuçrî mûla tantra, traité qui, attribué ainsi que tous les autres à Çâkyamuni, renferme sous forme de prédictions l’indication de quelques événements historiques et les noms de personnages importants. C’est ainsi que Çâkya y prédit la venue future de Nâgârdjuna, quatre cents ans après lui. Il annonce également celle de Pâṇini, de Tchandragupta et d’Ârya sam̃gha ; ce dernier est le philosophe célèbre, chef de l’école Yôgâtchâra, que Csoma place dans le vie ou viie siècle de notre ère[2]. Ces indices confirment ce que j’ai dit en commençant, de la place que doivent occuper les Tantras dans l’ensemble de la littérature buddhique dont ils forment manifestement la partie la plus moderne. Cependant ils suffisent déjà pour faire apprécier l’avantage qu’il y aurait à exécuter un dépouillement régulier de ces livres, à l’effet d’en extraire les documents historiques qui s’y trouvent épars.

J’ai dit plus haut qu’on rencontrait dans les Tantras des Mantras et Dhâraṇîs ou formules magiques, lesquelles constituent aux yeux des dévots une des parties les plus importantes de ces livres. Je n’ai pu découvrir la différence qui distingue un Mantra d’une Dhâraṇî, si ce n’est que le Mantra m’a toujours paru être plus court que la Dhâraṇî, laquelle est quelquefois très-développée. C’est ce que je conclus des Mantras contenus dans les fameuses feuilles d’Ablaïkit, définitivement traduites par Csoma de Cörös ; ils sont en général plus courts, plus semblables à une formule d’adoration que les Dhâraṇîs dont je parlerai tout à l’heure[3]. Il faut ajouter à cette différence que le terme de Mantra est un nom

  1. Analys. of the Sher-chin, dans Asiat. Res., t. XX, p. 488 et 564.
  2. Analys. of the Sher-chin, p. 513.
  3. Translat. of a Tibet. Fragm., dans Journ. Asiat. Soc. of Bengal, t. I, p. 273 sqq. Csoma en a donné le texte lithographié.