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INTRODUCTION À L’HISTOIRE

« l’or, » et l’ouvrage passe pour un Sûtra qui aurait été prêché par Çâkya sur la montagne de Grĭdhra kûṭa dans le Magadha[1]. Ânanda demande à Bhagavat s’il va lui enseigner la Loi ; et celui-ci répond qu’il veut exposer le Roi des Sûtras, le Suvarṇa prabhâsa, dont il fait un pompeux éloge en vers médiocres, qui remplissent le premier chapitre. Le second s’ouvre par la question que se fait un Bôdhisattva, nommé Rutchira kêtu, sur les raisons de la courte durée de l’existence de Çâkya, laquelle ne doit être que de quatre-vingts ans. Il trouve que Bhagavat a donné pour motif d’une aussi courte existence l’aversion qu’on éprouve à priver de la vie un être quelconque, et la disposition où l’on se trouve de donner des aliments à ceux qui en ont besoin, aux dépens même de son propre corps. Au moment où il conçoit cette pensée, il lui apparaît un vaste édifice, fait de lapis-lazuli, et rempli des meubles et des objets les plus précieux. À l’orient il voit le Tathâgata Akchôbhya, au midi Ratna kêtu, à l’occident Amitâbha, et au nord Dundubhîçvara. À la vue de ces merveilleuses apparitions, Rutchira kêtu ne peut contenir son étonnement ; la question qu’il s’était faite touchant la durée de la vie de Çâkyamuni se représente à son esprit, et alors les Tathâgatas qui se sont montrés à ses yeux s’adressent à lui en ces termes : Ne dis pas, ô fils de famille, que la vie de Çâkyamuni soit de courte durée ; car nous ne voyons personne dans l’univers qui soit capable de connaître le terme de la vie du Tathâgata Çâkyamuni, tant elle se compose d’un nombre incommensurable de millions d’âges et d’années. En cet instant des Dieux de différents ordres se réunirent en nombre immense dans le palais de Rutchira kêtu ; et alors les Tathâgatas qui lui avaient apparu se mirent à exposer en stances mesurées la durée de la vie de Çâkyamuni le Tathâgata, en présence de l’Assemblée réunie devant eux.

Cependant il y avait dans l’Assemblée du mont Grĭdhra kûta un Brâhmane nommé Vyâkarana Kâuṇḍinya, qui ayant entendu parler du Nirvâṇa complet de Çâkyamuni, lui demanda, au nom de son immense miséricorde, de lui accorder

    ce mot soit classique dans ce sens ; cependant il est régulièrement formé de bhâsa, qui a cette signification.

  1. La montagne de Grĭdhra kûta est le célèbre Pic du Vautour, dont Fa hian parle en plus d’un endroit de sa relation. (Foe koue ki, p. 253 et 269.) Klaproth a parfaitement déterminé la position de cette montagne, dont le nom s’est conservé, selon toute apparence, dans celui de Giddhaur (Foe koue ki, p. 260 et 270), qui s’applique actuellement au fort situé sur sa partie la plus élevée. (The Hist., etc., of East-India, t. II, p. 51 sqq.) Cette dénomination est, du reste, ancienne dans l’Inde, car on la trouve déjà dans les traditions recueillies par le Mahâbhârata. La Terre personnifiée y révèle à Kaçyapa que plusieurs descendants de la race des Kchattriyas, et notamment Vrĭhadratha, qui avaient échappé à la vengeance de Paraçurâma, fils de Djamadagni, s’étaient réfugiés à Grĭdhra kûta. (Mahâbhârata, Çântiparvan, ch. XLIX, st. 1796, t. III, p. 428, éd. Calcut.