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DU BUDDHISME INDIEN.

la sensation indiqués dans le commentaire précité ; ce sont toutes les sensations et toutes leurs espèces. C’est avec ce caractère de généralité que le mot Skandha est employé dans le passage suivant d’un Sûtra cité par l’auteur du commentaire sur l’Abhidharma kôça : « Ces conditions des Buddhas, telles que « les conditions dites Âvênikas et autres, eh bien ! à cause de leur subtilité et de leur profondeur excessives, il n’y a qu’ignorance à leur égard pour d’autres que pour le Buddha. C’est ainsi qu’il est dit : Connais-tu, ô Çâriputtra, la masse de la morale ou toute la morale, Çîla skandha, du Tathâgata, toute sa méditation, toute sa science, tout son affranchissement, toute sa science de l’affranchissement[1] ? »

Pour traduire exactement ce terme difficile, il faudrait donc employer le mot agrégat ; mais ce terme n’est pas plus clair que celui de Skandha, et il aurait besoin pour être bien entendu d’un commentaire perpétuel. Je doute d’ailleurs que ce fût donner une idée juste du rôle que joue ce terme dans l’expression composée Upâdâna skandha, que de dire ce les agrégats qui servent à la conception. » J’ai donc préféré le mot attribut, parce que, comme je l’ai déjà dit à l’occasion d’un fragment de la Pradjnâ pâramitâ, les Skandhas qui sont la forme, la sensation, l’idée, les concepts et la connaissance, sont de véritables attributs intellectuels qui constituent dans l’homme le domaine de l’intelligence, en ce qu’ils embrassent les diverses phases du fait de connaître, depuis le point de départ qui en est en quelque sorte l’occasion, c’est-à-dire la forme, jusqu’au terme dernier qui est la connaissance même. Une traduction parfaitement exacte du mot Skandha, au moins dans le composé Upâdâna skandha, serait celle qui rendrait ce terme par moyen, aide, de cette manière : « les moyens qui servent à la conception, » à peu près comme l’entend M. Goldstueker dans une note que j’ai transcrite tout à l’heure. Mais cette interprétation, en ne montrant que l’application spéciale de Skandha dans le composé Upâdâna skandha, manquerait de généralité et laisserait dans l’ombre le sens collectif que prend ce mot lorsqu’il est joint à l’un ou à l’autre des cinq attributs intellectuels, comme Vêdanâ skandha, la masse des sensations, pour dire toutes les sensations, toute espèce de sensation.

En commençant l’analyse des ouvrages conservés au Népâl qui sont spécialement relatifs à l’Abhidharma ou à la métaphysique, j’ai dit que les volumineuses rédactions de la Pradjnâ pâramitâ n’étaient pas les seuls traités où l’on pouvait puiser la connaissance de la partie spéculative du Buddhisme. J’ai cité, entre autres, plusieurs Sûtras, qui offrent une analogie frappante avec les livres

  1. Abhidharma kôça vyâkhyâ, f. 4 b, manuscrit de la Société Asiatique.