sattva : Il faut que je conduise au Nirvâṇa complet les créatures dont le nombre est immense, il faut que je les y conduise ; il n’existe cependant ni créatures qui doivent y être conduites, ni créatures qui y conduisent ; et que cependant il ne conduit pas moins toutes ces créatures au Nirvâṇa complet. Or il n’existe ni créatures qui arrivent au Nirvâṇa complet, ni créatures qui en conduisent d’autres. Pourquoi cela ? Parce que, ô Subhûti, c’est le caractère d’une illusion, que le caractère propre qui constitue les êtres ce qu’ils sont. C’est, ô Subhûti, comme si un habile magicien ou le disciple d’un magicien faisait apparaître dans le carrefour de quatre grandes routes une immense foule de peuple, et qu’après l’avoir fait paraître, il la fît disparaître. Que penses-tu de cela, ô Subhûti ? y a-t-il là quelqu’un qu’un autre ait tué, ait fait mourir, ait anéanti, ait fait disparaître ? Subhûti répondit : Non, certes, Bhagavat. C’est cela même, ô Subhûti, reprit Bhagavat ; le Bôdhisattva Mahâsattva conduit au Nirvâṇa complet un nombre immense, incalculable, infini de créatures ; et il n’existe ni créatures qui y soient conduites, ni créatures qui y conduisent. Si le Bôdhisattva Mahâsattva, en entendant faire cette exposition de la Loi, ne s’effraye pas et n’éprouve pas de crainte, il doit être reconnu, ô Subhûti, comme revêtu d’autant de la grande cuirasse.
Alors Subhûti parla ainsi à Bhagavat : Si je comprends bien le sens de ce qu’a dit Bhagavat, le Bôdhisattva doit être reconnu comme n’étant pas revêtu de la grande cuirasse. Bhagavat reprit : C’est cela, Subhûti, c’est cela même. Le Bôdhisattva doit être reconnu comme n’étant pas revêtu de la grande cuirasse. Pourquoi cela ? C’est que l’omniscience n’est pas une chose qui soit faite, qui soit modifiée, qui soit composée. Et de même elles ne sont pas faites, elles ne sont pas modifiées, elles ne sont pas composées les créatures dans l’intérêt desquelles il est revêtu de la grande cuirasse.
Cela dit, Subhûti parla ainsi à Bhagavat : C’est cela, Bhagavat, c’est cela même. Pourquoi cela ? C’est que, ô Bhagavat, la forme n’est ni liée, ni détachée, et qu’il en est de même de la sensation, de l’idée, des concepts, de la connaissance, qui ne sont ni liés ni détachés.
Alors Pûrṇa, fils de Mâitrâyaṇî, parla ainsi à Subhûti : Ne dis-tu pas, Subhûti : La forme n’est ni liée ni détachée, et de même la sensation, l’idée, les concepts, la connaissance ne sont ni liés ni détachés ? Ne dis-tu pas, ô Subhûti : L’essence même de la forme n’est ni liée ni détachée ; et de même l’essence de la sensation, de l’idée, des concepts, de la connaissance n’est ni liée ni détachée ? Alors qu’est-ce donc, ô Subhûti, que la forme que tu appelles une forme qui n’est ni liée ni détachée ? De même, qu’est-ce donc que la sensation, que l’idée, que les concepts, que la connaissance, toutes choses que tu appelles ni