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DU BUDDHISME INDIEN.


Ce noble trésor de vertu, ce Religieux compatissant pour les pauvres et les misérables, qui ne se reposait jamais, qui portait le costume du Sage qui sait tout, ce maître intelligent qui a conservé le dépôt de la Loi, est-il un homme qui pourrait énumérer complètement ses qualités ? C’est à lui que le Djina bienveillant a cédé la moitié du meilleur des sièges.

Alors le roi Açôka ayant donné cent mille [Suvarṇas] pour le Stûpa de Mahâ Kâçyapa le Sthavira, parla ainsi les mains réunies en signe de respect : J’honore le Sthavira Kâçyapa qui se retirait dans les cavernes des montagnes, qui n’aimait ni les combats ni les haines, ce sage plein de quiétude, en qui la vertu du contentement était à son comble.

Le Sthavira Upagupta montra ensuite au roi le Stûpa de Vakkula[1] le Sthavira, et lui dit : Voici, ô grand roi, le Stûpa de Vakkula ; honore-le. Quels furent, reprit le roi, les mérites de ce sage ? Ce Religieux magnanime, répondit le Sthavira, a été désigné par Bhagavat comme le premier de ceux qui connaissent peu d’obstacles. Mais le Sthavira n’ajouta pas pour ce sage la stance formée de deux Pâdas. Le roi dit alors : Qu’on donne ici un Kâkaṇi[2]. Pourquoi, lui demandèrent ses ministres, après avoir fixé pour les autres Stûpas une somme égale, donnes-tu ici un Kâkaṇi ? Voici, répondit le roi, quelle est ma pensée : quoique ce sage ait avec la lampe de l’enseignement dissipé complètement les ténèbres qui obscurcissaient la maison de son cœur, il n’a pas, à cause de son peu de désirs, fait le bien des créatures, comme l’ont fait les autres, car il n’a jamais rencontré d’obstacles. À ces mots les ministres furent frappés d’étonnement, et tombant aux pieds du roi, ils s’écrièrent : Ah ! la modération des désirs de ce sage magnanime a été inutile, puisqu’il n’a pas rencontré de difficultés.

Le Sthavira Upagupta, montrant ensuite le Stûpa du Sthavira Ânanda, dit au roi : Voici, ô roi, le Stûpa du Sthavira Ânanda ; honore-le. Quels furent, dit Açôka, les mérites de ce Religieux ? Ce sage, reprit le Sthavira, a été le

  1. Le texte écrit le nom de ce Religieux Vatkula ; mais je n’hésite pas à corriger cette orthographe, et à la remplacer par celle de Vakkula, nom d’un des Auditeurs de Çakyamuni, cité dans le Lotus de la bonne Loi (fol. 114 a du texte, p. 126 de la trad.) et dans le Vocabulaire pentaglotte. (Sect. xxi, n° 17.) Ce nom serait peut-être plus régulièrement écrit de l’une de ces deux manières, Vakula ou Vakkula. Je n’ai pas osé l’identifier avec celui de Vakkalin (pour Valkalin), Brâhmane dont il a été parlé plus haut, dans la légende de Pûrṇa, ci-dessus, p. 238.
  2. J’ai conservé ce mot sans le traduire, parce que le sens que Wilson lui donne dans son lexique n’a rien à faire ici. Il est évident qu’il s’agit dans notre texte d’une monnaie, et sans doute d’une monnaie de peu de valeur. Comme kâka est un des mots synonymes de raktikâ, c’est-à-dire de la graine de l’abrus precatorius, laquelle exprime un poids d’une valeur de 2 3/16 grains troy anglais, il est permis de croire que kâkaṇi est ou ce poids même, ou une mesure donnée de Kâkas ou de Raktikâs, ce qui paraît plus probable.