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DU BUDDHISME INDIEN.

ses mains en signe de respect, parla ainsi pour apaiser le Religieux : Pardonne-moi, ô fils du Sage qui possède les dix forces, pardonne-moi cette mauvaise action. Je m’en accuse aujourd’hui devant toi, et je cherche un refuge auprès du Buddha le Rĭchi, auprès de la première des Assemblées, auprès de la Loi proclamée par les Âryas.

Et je prends cette détermination : Aujourd’hui pénétré de respect pour le Buddha, et plein de la bienveillance que je ressens pour lui, j’embellirai la terre en la couvrant des Tchâityas du chef des Djinas, qui brilleront comme l’aile du cygne, comme la conque et comme la lune.

Cependant le Religieux sortit de la maison du bourreau, à l’aide de sa puissance surnaturelle. Le roi se mit aussi en devoir de se retirer ; mais Tchaṇḍa girika lui dit les mains jointes : Ô roi, tu m’as accordé cette faveur, qu’un homme une fois entré ici n’en peut plus sortir. Eh quoi ! reprit Açôka, tu voudrais donc aussi me mettre à mort ? Oui, répondit le bourreau. Et quel est, dit le roi, celui de nous deux qui est entré ici le premier ? Moi, dit Tchaṇḍa girika. Holà ! quelqu’un, s’écria le roi ; et aussitôt Tchaṇḍa girika fut saisi par les exécuteurs, qui le jetèrent dans la salle des tortures, et qui l’y firent périr dans le feu. La prison nommée l’Agréable fut démolie, et la sécurité fut rendue au peuple.

Ensuite le roi, voulant faire la distribution des reliques de Bhagavat, se mit à la tête d’une armée formée de quatre corps de troupes ; et ayant ouvert le monument nommé le Stûpa du vase, qui avait été construit par Adjâtaçatru, il se mit en possession des reliques[1]. Alors il distribua ces reliques au lieu d’où il les avait tirées ; et au-dessus de chacune des portions qu’il en fit, il éleva un Stûpa. Il fit de même du second Stûpa, et ainsi de suite jusqu’au sep-

    raison quant à l’orthographe ; et il aurait pu même observer qu’à la ligne 12 de la même inscription ce mot est écrit lâdjakâ, sans doute pour râdjakâ, dans cette phrase : hevam̃ marna lâdjakâ katâ, « c’est ainsi qu’est accompli mon ordre royal. » Je dis ordre royal par conjecture, peut-être est-ce « devoir de roi » qu’il faut dire. Mais d’abord, comme râdjakâ paraît être un dérivé de râdjan, il est nécessaire que l’idée de roi y paraisse ; ensuite, la teneur de l’inscription, où ce mot revient plusieurs fois, semble annoncer un commandement. On s’attendrait presque à voir ce mot défini dans ce monument, car le texte dit kim̃ti lâdjakâ. « Qu’est-ce que ce commandement royal ? » Malheureusement ce qui suit n’est pas une définition, mais bien une suite d’injonctions d’un caractère tout moral, qui n’est d’aucun secours pour la détermination précise du sens de râdjakâ. En résumé, je préfère traduire par « édit royal » le râdjikâ du texte de la légende ; et cette interprétation peut se concilier avec la première, si on admet que le roi ordonna qu’on élevât auprès ou à l’occasion de chaque Stûpa une colonne portant un édit royal touchant les principes fondamentaux de la Loi buddhique. (Voy. les additions, à la fin du volume.)

  1. Le Stûpa dont il est parlé en cet endroit est celui que le roi Adjâtaçatru fit construire à Râdjagriha, au-dessus de la portion de reliques dont il avait été mis en possession, lors du partage des os de Çâkyamuni Buddha. (Csoma, Asiat. Res., t. XX, p. 316.) Seulement l’expression dont se sert ici le texte m’oblige à constater une différence entre les données de notre légende et celles