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INTRODUCTION À L’HISTOIRE


et en comprendre la portée. Au corps des Religieux mendiants répondait celui des Religieuses mendiantes, pour l’admission desquelles on observait les mêmes règles que pour celle des Religieux ; on les nommait Bhikchuṇis[1]. Il ne paraît pas que l’institution d’un corps de Religieuses ait été primitivement dans la pensée de Çâkya. La première femme qui ait obtenu de lui la permission d’embrasser la vie ascétique est Mahâ Pradjâpatî, la Gâutamide sa tante, celle-là même qui l’avait élevé[2]. Encore n’y parvint-elle qu’après de longues instances, et le Maître ne céda qu’à la prière d’Ânanda son cousin[3]. La légende assure que cette conversion entraîna celle de cinq cents autres femmes de la race des Çâkyas[4] ; la légende aime les nombres ronds, et son récit pourrait bien n’être qu’une pure invention des compilateurs du Vinaya. Quoi qu’il en soit, la même autorité nous apprend qu’à Mahâ Pradjâpatî se joignirent bientôt les trois femmes de Çâkya, que Csoma nomme Gôpa, Yaçôdharâ et Utpalavarṇa[5]. La loi de la discipline imposait aux femmes les mêmes obligations générales qu’aux Religieux, savoir l’observation d’une chasteté perpétuelle et la nécessité de mendier pour vivre ; aussi leur donne-t-on le titre générique de Bhikchuṇi. Les monuments brâhmaniques nous montrent qu’en parlant d’une Religieuse, un Bhikchu l’appelait « sœur dans la Loi, » Dharma bhaginî[6]. On trouve dans les légendes du Nord plusieurs exemples de femmes converties au Buddhisme. Nous en avons vu quelques-unes citées dans la légende de la lutte de Çâkya contre les Brâhmanes ; il y faut joindre la jeune fille de la caste Tchâṇḍâla dont j’ai parlé à la fin de la section précédente, et avec plus de textes que nous n’en avons, on en trouverait d’autres encore.

À côté des Religieux des deux sexes, ou pour parler plus exactement, au-dessous de ces deux ordres qui constituent le fonds de l’Assemblée de Çâkya, les légendes placent les Upâsakas et les Upâsikâs, c’est-à-dire les dévots et les dévotes, et d’une manière plus générale, les fidèles qui faisaient profession de croire aux vérités révélées par Çâkya, sans adopter cependant la vie ascé-

  1. Csoma, Asiat. Res., t. XX, p. 84.
  2. Lalita vistara, f. 58 a de mon manuscrit. Csoma, Asiat. Res., t. XX, p. 308, note 21. A. Rémusat, Foe koue ki, p. 111.
  3. Csoma, Asiat. Res., t. XX, p. 90. Rémusat, Foe koue ki, p. 111.
  4. Csoma, Asiat. Res., t. XX, p. 90.
  5. Asiat. Res., t. XX, p. 308, note 21. Les deux premiers noms sont en effet ceux de deux femmes de Çâkya ; quant au troisième, voyez ce qui en a été dit ci-dessus, Sect. II, p. 161, note 2. Georgi ne cite que deux femmes de Çâkya, l’une qu’il nomme Grags-hdzon-ma (lisez Grags-hdjin-ma), c’est Yaçôdharâ ; l’autre qu’il nomme Sa-tsho-ma : si on lisait Ba-tsho-ma, ce serait Gôpâ. (Alphab. tibet., p. 34.)
  6. Mrĭtch tchhakaṭî, p. 258, éd. Calc. Wilson, Hindu Theatre, t. I, p. 142, note †.