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NOTICE SUR LES TRAVAUX DE M. EUGÈNE BURNOUF.

qui place la mort du Bouddha 547 ans avant l’ère chrétienne. Malgré des recherches infinies, ce sujet n’a point été achevé par M. Eugène Burnouf ; et cette seconde assise manque à son édifice. Il terminait, quand il a été frappé, l’impression d’un volume qui, sans remplacer celui qu’on attendait, complétera, du moins à quelques égards, celui qu’on possède : c’est la traduction d’un des principaux soûtras bouddhiques, Saddharma Poundarika, c’est-à-dire le Lotus de la bonne loi. Commencée voilà plus de quinze ans, cette traduction était retardée de jour en jour par les développements que prenaient ces études admirables sous la plume de M. Eugène Burnouf. La préface au Lotus de la bonne loi était devenue peu à peu l’Introduction à l’histoire du bouddhisme indien, dont nous n’avons que la moitié ; et quelques-unes des notes qu’il ajoutait sans cesse à ce soûtra forment, ainsi qu’on pourra bientôt s’en convaincre, des volumes et des traités entiers. Mais il sera temps de s’occuper de cette œuvre suprême de notre confrère, quand elle aura été publiée ; le monde savant n’aura pas longtemps à l’attendre. Quant au travail sur la collection singhalaise, il ne lui sera jamais donné ; et malgré toute l’utilité que je reconnais à la traduction du Lotus, j’avoue que j’eusse préféré de beaucoup l’analyse et la critique des livres bouddhiques de Ceylan. Regrets superflus ! il faut nous contenter de débris et de ruines qui, je le crains bien, ne seront plus relevées.

Quoi qu’il en soit, l’Introduction à l’histoire du bouddhisme indien, tout incomplète qu’elle est, n’en aura pas moins fondé la véritable étude du bouddhisme. C’est désormais en suivant les traces de M. Eugène Burnouf et en s’adressant aux originaux sanscrits qu’on pourra la continuer. Grâce à lui, nous savons déjà quand est née cette religion à la fois si puissante et si absurde, comment elle s’est développée au sein du brahmanisme en essayant de le réformer, quels sont ses dogmes essentiels, les phases principales par lesquelles elle a passé à ses débuts ; et, comme le dit M. Eugène Burnouf lui-même, il nous a fait connaître le bouddhisme indien jusqu’au moment où il entre dans l’histoire. C’était là le point capital pour nous. L’histoire du bouddhisme nous est ou nous sera connue par les annales des différents peuples qui l’ont successivement reçu. Ce qui nous intéressait par dessus tout, c’était de savoir ce qu’était le bouddhisme lui-même ; car l’histoire, en s’occupant des événements extérieurs, pouvait nous laisser ignorer le fond des doctrines d’où ces événements étaient sortis. Cette connaissance exacte des dogmes bouddhiques a déjà produit une très-grave conséquence : elle a dissipé toutes ces hypothèses insensées qui établissaient entre la religion chrétienne et le bouddhisme des relations imaginaires. Il est désormais prouvé que le bouddhisme est antérieur de six ou sept siècles au moins au christianisme ; mais il n’est pas moins prouvé que le christianisme est par ses doctrines plus loin encore de la religion bouddhique qu’elle ne l’est de lui chronologiquement. Comme on s’est trop souvent servi de ces hypothèses dans des camps opposés, il est bon de les réfuter une fois de plus, tout insoutenables qu’elles sont, et d’indiquer aux amis de la vérité les documents où ils pourront la trouver dans toute sa simplicité et dans toute sa lumière. Au fond, le boud-