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DU BUDDHISME INDIEN.

Râkchasas, et on le représente se rendant à l’île de Sim̃hala (Ceylan), où il prêche aux démons femelles qui peuplent cette île la nécessité du jeûne et de la confession. Une fois les Râkchasîs converties au Buddhisme, il se transporte à Bénârès, pour rendre le même service à des êtres que leurs mauvaises actions avaient réduits à la condition misérable d’insectes et de vers. Il va ensuite dans le Magadha, où il sauve miraculeusement les habitants d’une famine terrible. Puis il vient assister à l’assemblée des Auditeurs de Viçvabhû, réunie à Djêtârâma, et leur enseigne les moyens d’arriver à la connaissance de l’état de Buddha parfaitement accompli.

Çâkyamuni expose alors que c’est à ses méditations qu’Avalôkitêçvara doit la faculté d’accomplir de si grandes choses, et que lui-même en particulier a été jadis sauvé d’un danger imminent par ce saint Bôdhisattva. À ce sujet il raconte l’histoire de Sim̃hala, fils du marchand Sim̃ha, qui s’étant embarqué pour aller à la recherche des pierres précieuses dans une île éloignée, est assailli en approchant de Tâmradvîpa (la même que Tâmraparṇa, la Taprobane des anciens), par une tempête que soulèvent les Râkchasîs, Divinités malfaisantes qui habitent cette île. Il fait naufrage avec ses compagnons, et parvient en nageant jusqu’au rivage, où paraissent les Râkchasîs, qui sous la figure de belles femmes entraînent les marchands à se livrer au plaisir avec elles. Sim̃hala, après avoir passé la nuit dans les bras d’une de ces femmes, apprend de la lampe qui les éclaire qu’il est tombé entre les mains d’une ogresse dont il sert les plaisirs et qui doit le dévorer. Il est averti que d’autres marchands naufragés comme lui ont été, depuis son arrivée, jetés dans une prison d’où les Râkchasîs les tirent chaque jour pour se repaître de leur chair. Instruit par les révélations de la lampe, il se rend avec ses compagnons sur le rivage, où lui apparaît un cheval miraculeux qui doit le transporter hors de l’île. Mais il faut qu’il se garde de retourner la tête en arrière ; celui qui, se laissant toucher par les larmes des Râkchasîs, jettera un seul regard sur le rivage, est condamné à tomber dans l’Océan, où l’attendent les ogresses pour le mettre à mort. Les compagnons de Sim̃hala consentent de grand cœur à quitter l’île avec lui ; mais infidèles à leurs promesses, ils prêtent l’oreille aux plaintes des femmes qu’ils abandonnent, et disparaissent l’un après l’autre, dévorés par les Râkchasîs. Sim̃hala seul échappe ; et malgré les poursuites de la femme qu’il a laissée dans l’île, le cheval merveilleux le transporte dans l’Inde.

Cette partie de l’ouvrage, dont je n’ai donné qu’une analyse très-succincte, est de beaucoup supérieure au reste, mais le fond en appartient à d’autres légendes buddhiques ; et je n’ai pas besoin d’appeler l’attention des lecteurs auxquels sont familiers les contes orientaux sur les ogresses et le cheval mer-