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DU BUDDHISME INDIEN.


dans le Nirvâṇa complet, au pays des Mallas[1], dans le bois des deux Çâlas[2].

Alors un des Religieux prononça en ce moment la stance suivante : C’est là, Seigneur, ton dernier regard jeté sur Vâiçalî ; le Sugata Buddha n’ira plus à Vâiçâlî ; il ira, pour entrer dans l’anéantissement, au pays des Mallas, dans le bois des deux Çâlas.

Au moment où Bhagavat prononça ces paroles : C’est la dernière fois que le Tathâgata regarde Vâiçâlî, les nombreuses Divinités qui habitaient le bois près de cette ville répandirent des larmes. Ânanda le Sthavira[3] dit alors : Il faut, ô Bhagavat, qu’il y ait un nuage pour produire cette pluie abondante. Bhagavat répondit : Ce sont les Divinités habitantes du bois de Vâiçâlî, qui à cause de mon départ répandent des larmes. Ces Divinités firent entendre aussi cette nouvelle dans Vâiçâlî : Bhagavat s’en va pour entrer dans l’anéantissement complet ; Bhagavat n’ira plus à Vâiçâlî. Ayant entendu la voix de ces Divinités, plusieurs centaines de mille d’habitants de Vâiçâli vinrent se réunir en présence de Bhagavat. Celui-ci connaissant leur esprit, leurs dispositions, leur caractère et leur naturel, leur fit une telle exposition de la loi, que ces nombreuses centaines de mille d’êtres vivants reçurent les formules de refuge et les axiomes de l’enseignement. Quelques-uns obtinrent la récompense de l’état de Çrôta âpatti[4] ;

    d’Allahabad, anciennement Prayâga. (Asiat. Res., t. XX, p. 62 et 86.) Auprès de cette ville était un jardin, dont une femme, nommée par Fa hian An pho lo, et par Hiuan Thsang An meou lo (Foe koue ki, p. 242 et 245), fit don à Çâkyamuni. Wilson, par un rapprochement que je ne me permets pas de juger, a proposé de voir dans le nom de cette femme, Ahalyâ, la vertueuse épouse de Gâutama. (Journ. of the Roy. Asiat. Soc., t. V, p. 128 et 129.) Je pense, pour ma part, que les syllabes chinoises An pho lo, ou bien An meou lo sont la transcription du nom de Ambapâli, célèbre courtisane de Vâiçâlî, dont il est question dans les légendes, et sur laquelle M. Tournour nous a donné des détails très-curieux. (Journ. Asiat. Soc. of Bengal, t. VII, p. 999.) Le Parinibbâṇa sutta des Singhalais fait de cette donation un récit extrêmement intéressant. J’ajoute ici que Fa hian, auquel la tradition de ce dernier séjour de Çâkyamuni à Vâiçâlî était bien connue, puisqu’il la rapporte à peu près dans les mêmes termes que notre texte, dit, avec son exactitude ordinaire, que Çâkya, sur le point d’entrer dans le Nirvâṇa, sortit de Vâiçâlî par la porte occidentale. Cela est parfaitement vrai, puisqu’il se dirigeait à l’Occident, vers Kuçigrâmaka, que je crois être la même ville que la Kusinârâ des livres pâlis.

  1. Les Mallas étaient les habitants du pays où était situé Kuçigrâmaka, dans la contrée que baigne la Gaṇḍakî. Ce sont probablement eux qui sont mentionnés par le Digvidjaya du Mahâbhârata (t. I, p. 347, st. 176), et qui sont placés au pied de l’Himalaya, dans la partie orientale de l’Hindoustan. (Wilson, Vishṇu pur., p. 188, notes 38 et 52.) On sait que ce pays, notamment les districts de Gorakpour, de Beltiah et de Baknih, conservent encore aujourd’hui des traces très-précieuses de l’ancienne prédominance du Buddhisme.
  2. Shorea robusta.
  3. Ce mot signifie vieillard ; j’en parlerai plus bas, dans la section de la Discipline.
  4. Ce terme, ainsi que les suivants, Sakrĭd âgâmin, Anâgâmin, Bôdhi, etc., sera expliqué plus bas, dans la section de la Discipline.