Page:Burnouf - Introduction à l’histoire du bouddhisme indien.djvu/117

Cette page a été validée par deux contributeurs.
75
DU BUDDHISME INDIEN.


gieux, sont périssables ; ils ne sont pas durables ; on ne peut s’y reposer avec confiance ; leur condition est le changement, tellement qu’il ne convient pas de concevoir rien de ce qui est un composé, qu’il ne convient pas de s’y plaire[1]. C’est pourquoi, ô Religieux, ici ou ailleurs, quand je ne serai plus, les lois qui existent pour l’utilité du monde temporel, pour le bonheur du monde temporel, ainsi que pour son utilité et son bonheur futurs, il faut qu’après les avoir recueillies, comprises, les Religieux les fassent garder, prêcher et comprendre, de manière que la loi religieuse ait une longue durée, qu’elle soit admise par beaucoup de gens, qu’elle soit répandue partout, jusqu’à être complètement expliquée aux Dêvas et aux hommes. Maintenant, ô Religieux, il existe pour l’utilité du monde temporel, pour le bonheur du monde temporel, ainsi que pour son utilité et son bonheur futurs, des lois que les Religieux, après les avoir recueillies, comprises, doivent faire garder, prêcher et comprendre, de manière que la loi religieuse ait une longue durée, qu’elle soit admise par beaucoup de gens, qu’elle soit répandue partout, jusqu’à être complètement expliquée aux Dêvas et aux hommes. Ces lois sont les quatre soutiens de la mémoire[2], les quatre abandons complets, les quatre principes de la puissance surnaturelle, les cinq sens, les cinq forces, les sept éléments constitutifs de l’état de Bôdhi, la voie sublime composée de huit parties[3]. Ce sont là les lois, ô Religieux, qui existent pour l’utilité du monde temporel, pour le bonheur du monde temporel, ainsi que pour son utilité et son bonheur futurs, et que les Religieux, après les avoir recueillies, comprises, doivent faire garder, prêcher et comprendre, de manière que la loi religieuse ait une longue durée, qu’elle soit admise par beaucoup de gens, qu’elle soit répandue partout, jusqu’à être complètement expliquée aux Dêvas et aux hommes. — Allons, ô Ânanda, vers Kuçigrâmaka[4]. — Oui, vénérable ; ainsi répondit à Bhagavat le respectable Ânanda.

  1. Le texte se sert ici du terme difficile de Sam̃skâra, qui a plusieurs acceptions, et entre autres celles de conception et de composé ; j’y reviendrai plus bas dans la section de ce Mémoire consacrée à la Métaphysique.
  2. Voy. les additions à la fin du volume.
  3. Je crois que les huit parties dont se compose cette voie ou cette conduite sublime (Âryamârga), sont les huit qualités dont je trouve l’énumération dans le Mahâvastu : la vue, la volonté, l’effort, l’action, la vie, le langage, la pensée, la méditation droites, ou justes et régulières. (Mahâvastu, f. 357 a de mon man.) Ces qualités sont toutes exprimées par un terme dans la composition duquel entre l’adjectif samyatch. Cette énumération appartient à toutes les écoles buddhiques.
  4. Kuçigrâmaka est la ville que les textes pâlis de Ceylan nomment Kusinârâ, et que Hiuan thsang, au viie siècle de notre ère, appelle en chinois Kiu chi na kie lo, transcription qui suppose un primitif sanscrit Kuçinagara ; nous la verrons ailleurs nommée Kuçinagarî. La différence, au reste, est de peu d’importance, puisqu’elle porte uniquement sur le mot grâma, qui désigne un bourg ou une ville située dans un pays de culture, mais non fortifiée, et sur nagara, nom qu’on donne ordinairement à une ville défendue par quelques travaux ou par un fort. Ce qui, au temps