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INTRODUCTION À L’HISTOIRE

ratna[1]. » J’avoue que je ne comprends pas bien la portée de cette distinction entre les Mahâyâna sûtras et les Sûtras nommés collectivement Dharma ratna. Ce dernier titre signifie littéralement « joyau de la loi, » et l’on sait que le mot ratna, placé à la suite d’un autre terme, désigne chez les Buddhistes ce qu’il y a de plus éminent parmi les êtres ou les choses définis par ce terme. Faut-il chercher ici une allusion très-vague, il est vrai, à une division admise par les interprètes tibétains du Kah-gyur, et qui consiste à faire deux parts des ouvrages contenus dans cette collection, l’une nommée Mdo ou Sûtra, l’autre Rgyud ou Tantra[2] ? J’avoue que je ne puis affirmer rien de positif à cet égard, et c’est parce que la division qu’indique le texte précité ne m’a pas paru suffisamment précise que je n’en ai pas parlé au commencement de mes recherches, quoiqu’elle fût la plus générale de celles que nous devons à M. Hodgson. Mais il faut reconnaître aussi qu’elle est la moins instructive, et qu’elle nous avance bien peu dans la connaissance des livres très-divers qu’elle embrasse.

Celle qu’indique Csoma de Cörös est certainement plus intéressante, en ce qu’elle distingue nettement les Tantras, ou rituels où le Buddhisme est mêlé à des pratiques Çivaïtes, de toutes les autres écritures buddhiques, quelles qu’elles soient. En mettant d’un côté, sous le nom de Sûtra, tout ce qui n’est pas Tantra, elle place cette seconde classe de livres au point de vue sous lequel nous reconnaîtrons qu’on la doit envisager. C’est, quant à présent, tout ce qu’il faut dire de cette distinction ; nous verrons plus tard l’avantage qu’il est possible d’en tirer. Je remarque seulement que cette distinction, par suite de laquelle les Tantras sont mis en dehors de la collection des Sûtras, n’était pas inconnue à M. Rémusat, qui s’exprime ainsi : « Généralement, on ne compte « pas les Pradjñâ pâramitâs et les Dhâraṇîs parmi les collections des livres sacrés, dont on désigne l’ensemble par les mots de trois collections[3]. »

Enfin, et c’est par là que je terminerai cette description générale de la Collection buddhique, les Népâlais, suivant M. Hodgson, détachent de cette collection neuf ouvrages, qu’ils appellent les neuf Dharmas, ou les neuf Recueils de la loi par excellence[4] ; ils rendent un culte constant à ces ouvrages ; mais M. Hodgson ignore les raisons de cette préférence. Ces livres sont les suivants : 1o Pradjñâ pâramitâ, 2o Gaṇḍa vyûha, 3o Daça bhûmîçvâra, 4o Samâdhi râdja, 6o Langkâvatâra,

  1. Notices, etc., dans Asiat. Researches, t. XVI, p. 422. Dans les Quotations from orig. Sanscr. authorities, M. Hodgson donne ce passage comme emprunté au Guṇa karaṇḍa vyûha. (Journ. Asiat. Soc. of Bengal, t. V, p. 87.) Il est possible que le Pûdjâ khaṇḍa soit un livre moderne.
  2. Csoma, Analysis of the Sher-chin, etc., dans Asiat. Researches, t. XX, p. 412.
  3. Foe koue ki, p. 109.
  4. Notices, etc., dans Asiat. Researches, t. XVI, p. 423 et 424.