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les tourmens de la terre ne sont rien au prix de cette lettre » !…

Il la relut encore : « Évelina, me dit-il, elle me charge de te recevoir ; veux-tu m’aider à remplir sa volonté ? as-tu la force d’avouer pour père le bourreau de ta mère » ?

Quelle terrible question ! j’en ai frémi.

« Je dois rétablir sa réputation, et avouer sa fille ; c’est à ces conditions qu’elle a signé mon pardon. — J’ai déjà fait tout ce qui dépendoit de moi pour justifier son honneur aux yeux du monde entier ; et avec qu’elle joie ne voudrois-je pas ouvrir mes bras à sa fille, — la presser sur mon cœur, chercher dans sa tendresse mon repos et ma consolation : mais j’en suis indigne, je le sais, hélas ! j’ai mérité mes chagrins par mes crimes ».

J’essayai plusieurs fois de l’interrompre, mais ce fut en vain, la douleur m’avoit ôté l’usage de la parole.

Ses yeux étoient toujours fixés sur la lettre ; il s’arrêta sur-tout à ces mots : Mon enfant, ne ressemble point à ta mère. Il les répéta haut en s’écriant : « Quelle amertume il y a dans ces paroles ! — Viens ici, mon Évelina, que je te re-