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comme les détails dans lesquels je vais entrer pourroient révéler des secrets importans, je vous supplie de les regarder comme sacrés, malgré la précaution que j’ai prise de ne nommer personne.

Je suis né en Écosse, où j’ai été élevé par les soins d’une mère, Anglaise d’origine, et qui n’avoit point de parens dans ma patrie. Je fus l’objet de toute sa tendresse. Elle me disoit souvent que la vie retirée que nous menions, et notre éloignement de sa famille, provenoient d’une mélancolie invincible, dans laquelle l’avoit jetée le décès de mon père, mort subitement peu de temps avant ma naissance.

J’ai fait des études à Aberdeen, où je me liai d’amitié avec un jeune homme fort riche ; liaisons que j’envisageai comme le premier bonheur de ma vie, et qui devinrent pour moi une source de chagrins. Mon ami étant sur le point de quitter l’académie, se disposa à voyager, et il fallut nous séparer. J’étois destiné à l’église, et je n’avois d’autre fortune que celle que je pouvois acquérir par mes talens ; je n’osois donc pas même former le projet de l’accompagner. Il est vrai qu’il se seroit fait un plaisir de me défrayer ; mais un pareil arrangement ne