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vous parler enfin sans témoins ! J’en ai cherché l’occasion assez long-temps : mais on diroit qu’il y avoit un complot contre moi ; on ne m’a pas laissé une minute pour être à vous ». Il ajouta à l’audace de ce compliment, celle de saisir ma main.

Après avoir été en butte au mépris de cet homme, je devois naturellement être fort étonnée de son propos ; je le regardai fixement sans daigner lui répondre.

« Si vous n’étiez pas, continua-t-il, une petite cruelle, vous eussiez bien pu m’aider à trouver le moyen de vous voir plutôt : vous n’ignorez pas comment on m’épie ici ; lady Louise ne me quitte point des yeux, et me donne un joli avant-goût des plaisirs du ménage ; mais heureusement cela ne sera pas long ».

J’étois indignée, et cherchons à rompre cet entretien au plus vite. Madame Beaumont qui est survenue m’a tirée d’embarras, et mylord Merton, sans se décontenancer, s’est adressé à elle en lui criant : « Bonjour, madame ; où est lady Louise ? vous voyez que je ne puis pas vivre un moment sans elle ». Il n’est guère possible de pousser l’effronterie plus loin.